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le vendeur autant que pour l’acheteur, ne reçut aucune exécution[1].

La déclaration du 23 février avait réuni la banque à la compagnie ; l’arrêt du 5 mars assimile le billet à l’action. Il commence par prescrire au trésorier de la banque de faire rembourser à leur échéance tous les prêts qui ont été faits ; mais aussitôt il ordonne qu’un bureau sera ouvert pour convertir, au prix fixe de 9,000 livres, les actions en billets et les billets en actions, à la volonté des porteurs. Le bureau d’achat et de vente des actions à 9,600 livres, que la délibération de l’assemblée du 22 avait supprimé, se trouve ainsi rétabli par ordre du roi, et on ne fait rentrer les sommes prêtées sur dépôt de titres que pour convertir les actions en billets, à la demande de tout actionnaire. Les soumissions et primes que la compagnie a délivrées lui seront rapportées dans le délai d’un mois pour être converties en actions à des conditions qui ont pour résultat de réduire trois actions ou promesses d’actions à deux. Toutes ces diminutions du nombre des actions ont pour but de rendre possible la distribution du dividende promis de 200 livres aux actions qui ne seront pas supprimées ; car, à cet effet, on dressera tous les six mois un état des actions converties en billets et des dividendes auxquels elles auraient eu droit pour en répartir le montant entre les actions non converties. Law prévit bien qu’on viendrait à la compagnie échanger des actions à 9,000 livres contre des billets et qu’on irait à la banque échanger ces billets contre des espèces. Aussi l’arrêt du 27 février, qui suivit de quelques jours la déclaration du 23 et qui précéda de quelques jours l’arrêt du 5 mars, avait défendu à chacun de garder plus de 500 livres en numéraire, afin de faire refluer l’or et l’argent dans les caisses de la banque. Cependant tout le numéraire existant en France ne suffira pas à soutenir les nouvelles émissions de billets qui seront

  1. On ne saurait trouver un témoignage plus autorisé de l’effet produit par la déclaration du 23 février et une appréciation plus judicieuse de la situation que ce passage de Forbonnais (t. II, p. 614) : « L’effet de la délibération du 22 ne fut favorable au système que jusqu’à l’impression de la déclaration du 23 qui l’autorisait. Le discrédit des billets de banque continua, et l’action continua de baisser journellement. Plus la banque payait lentement, plus on s’efforçait de réaliser. L’augmentation des espèces, le 25, ne parut qu’un expédient dont on voulait couvrir la disette des caisses, et la défense de prendre 5 pour 100 pour échanger les espèces en billets ne fit pas meilleur effet. — Le 27, on fit monter la défiance au plus haut point par la défense de garder plus de 500 livres en espèces. — La défense e fabriquer et de vendre de la vaisselle d’argent ne fut qu’une imprudence de plus et fit monter sa valeur à des sommes excessives, sans diminuer l’ardeur qu’on avait pour l’enlever. Le contrôleur-général, après avoir éprouvé si souvent que c’est compromettre l’autorité que de s’opposer au torrent des passions, se trouva dans un étrange embarras. Il se détermina à rendre le fameux arrêt du 5 mars qui décida la chute du système. »