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à Vienne par des lignes directes et de raccorder Pesth à Semlin vers le Danube par une voie traversant la Hongrie dans toute sa longueur et par le milieu même.

Or elle se heurtait, pour réaliser ces desseins, à la Staatsbahn, qui, maîtresse d’un court tronçon jusqu’à Raab, sur la rive droite du Danube, ne joignait Vienne à Pesth que par la rive gauche du fleuve ; de même qu’au-delà de Pesth son raccordement avec la Roumanie vers Orsova tendait à favoriser le trafic turco-russe au détriment du trafic turco-serbe. Un dissentiment secret semblait donc régner entre la Société autrichienne et le gouvernement hongrois. Au fond, il n’y avait point de désaccord réel, et le projet du chemin de fer Orient-Occident n’avait été conçu que parce qu’il avait paru d’une exécution plus facile et que toutes les parties semblaient s’être mises d’accord à son endroit. Il suffit d’une explication catégorique avec les membres du ministère hongrois pour que les administrateurs de la Staatsbahn se soumissent à ses vues et que tous leurs adhérens portassent leurs efforts vers le but auquel la Hongrie et, avec elle, l’Autriche et l’Allemagne, tendaient unanimement. L’entente s’est faite l’an dernier ; le dualisme a prévalu, et la Société autrichienne des chemins de fer de l’état a, de même que la Banque impériale de Vienne, subi dans son organisation une réforme qui donne toute satisfaction aux aspirations hongroises : cette modification dans la forme dut s’accomplir en même temps qu’au fond le plan adopté pour l’exécution des nouvelles lignes était changé. Suspendue pendant de longues années, l’exécution se fait rapidement, et la question toujours pendante se résoudra à bref délai. C’est, à vrai dire, un service indirect rendu par la mise au jour de ce chemin d’Orient-Occident, qu’on n’a pu le rejeter qu’en lui en substituant immédiatement un autre plus populaire, plus approprié aux besoins nouveaux que les changemens politiques survenus en Turquie ont fait naître de tant de côtés à la fois.

L’administration de la Société autrichienne a donc été l’objet d’une transformation sérieuse. De Société impériale royale privilégiée des chemins de fer de l’état, elle est devenue Société autrichienne-hongroise ; une direction a été établie à Pesth, ainsi qu’à Vienne. Un conseil d’administration siège dans l’une et l’autre ville, s’occupant des affaires spéciales à chacun des deux états. Paris, comme par le passé, conserve toujours un nombre égal d’administrateurs qui forment un comité représentant les intérêts étrangers. Les conseils spéciaux se réunissent à époques déterminées en un conseil général siégeant tantôt à Pesth, tantôt à Vienne, ce qui maintient l’unité sociale, qu’il importe avant tout de conserver. Ce n’est pas tout, et, à la suite de cette réforme, un traité a dû être conclu avec le gouvernement hongrois pour bien accentuer le