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frais de ses funérailles. D’autres églises reçoivent aussi des marques de son souvenir, et parmi elles, comme pour donner une nouvelle preuve de son attachement à son pays natal, il cite celle de Saint-Nicolas « de la nation lorraine » et l’église de Saint-Denis de Chamagne, où cinquante messes seront dites pour le repos de son âme. Personne, du reste, n’est oublié, ni les pauvres auxquels on distribuera dix écus en aumônes le jour même de sa mort ; ni les femmes qui, à ce moment, seront à son service ; ni aucun de ceux qui auraient pu lui être de quelque utilité ou lui témoigner quelque affection. Sur cette liste, de petites gens, comme Alardino l’expéditeur, comme la fille d’André son tailleur, et son filleul Giovanni Piomer, se trouvent cités à côté du cardinal Rospigliosi et de Mgr di Belmonte, qui tous deux ont aidé Claude et les siens de leurs bons offices ou de leurs conseils. Enfin, deux secrétaires apostoliques, Francesco Canser et Renato della Borne, sont priés de servir de tuteurs ou de curateurs à Agnès et de veiller sur ses intérêts. A chacune des personnes ainsi désignées on remettra quelque objet choisi pour elle, des dessins, des gravures ou l’un des rares tableaux qui se trouvent dans la maison de l’artiste, généralement des copies du Guide ou du Dominiquin. Quelques meubles, des chaînes et des médailles d’or et deux bagues enrichies de diamans, cadeaux de papes ou de souverains, seront partagés, entre Agnès et les deux neveux. Tout se trouvant ainsi réglé, Claude pouvait mourir en paix, et le 23 novembre 1682[1], il s’éteignait, après d’assez vives souffrances. Le 13 février de cette même année, probablement en prévision de sa fin prochaine, il avait encore ajouté un codicille à son testament. Suivant sa dernière volonté, il fut inhumé à l’église de la Trinité du Mont, qui, jusqu’en 1798, garda sa sépulture. À cette époque, cette église fut dévastée par les troupes françaises, et le monument de Claude n’ayant pas été plus respecté que les autres, ses restes furent, en 1840, sur la proposition de M. Thiers, transportés aux frais de l’état dans l’église Saint-Louis-des-Français.


V

Nous avons indiqué le rôle important qu’avait joué Paul Brill dans la création du paysage comme un genre distinct et se suffisant à lui-même. Claude doit beaucoup à ce maître. L’intelligence des beautés pittoresques, la mise en œuvre des élémens dont elles sont faites, ces riches végétations disposées pour offrir au regard un

  1. Et non le 25 novembre, ainsi que le porte l’épitaphe de la Trinité du Mont. L’acte du notaire mandé aussitôt après la mort de Claude, et qui certifie avoir reconnu son cadavre déposé dans une des salles du premier étage de la maison qu’habitait le peintre, est daté du 23 novembre.