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fond : elle se compose également de cinq volumes, mais de format in-18, publiés par l’éditeur Didier en 1846. C’est de cette nouvelle édition qu’a été détaché plus tard (1853) le livre du Vrai, du Beau et du Bien, qui, ayant eu beaucoup plus de succès que les autres, a eu un grand nombre d’éditions.

Pour se rendre compte du véritable enseignement de Cousin, c’est la première édition qu’il faut consulter, celle qu’avaient donnée ses élèves de 1836 à 1841. Voici comment est composée cette édition. Le premier volume comprend les deux premières années de l’enseignement de Cousin de la faculté des lettres, de 1815 à 1816, et de 1816 à 1817. Le second comprend le cours de 1818 : le Vrai, le Beau et le Bien. Le troisième reproduit la première partie du cours de 1819, à savoir la morale sensualiste du XVIIIe siècle ; le quatrième, la seconde partie de ce cours, la morale de l’école écossaise. Le cinquième enfin est consacré à la philosophie de Kant. J’ai dit déjà qu’il y a en outre un demi-volume contenant les principes généraux de la morale et de la politique. En 1820, le professeur fut obligé de quitter sa chaire dans des circonstances et pour des raisons que nous étudierons plus tard. Alors commence pour lui une période nouvelle, dont il n’est pas encore temps de parler.

Le premier des cinq volumes précédens, qui comprend le cours de 1816 et de 1817, ne peut exciter aujourd’hui qu’un assez faible intérêt ; et nous ne pourrions guère l’analyser, pour deux raisons : la première, c’est que Victor Cousin n’y est pas encore lui même ; il n’est que l’élève, le répétiteur de Royer-Collard ; la seconde, c’est que c’est un cours exclusivement historique, assez superficiel d’ailleurs, et qu’il serait peu utile pour nous de résumer des résumés-Mais il ne faut pas croire qu’à cette époque Victor Cousin ne fût occupé que d’histoire et qu’il ne pensât pas aux problèmes eux-mêmes. Au contraire, il semble bien que ce fut alors que sa pensée a le plus travaillé à remuer les problèmes philosophiques et à les traiter théoriquement. Seulement ce travail n’avait pas lieu à la faculté des lettres, où il occupait la chaire d’histoire, mais à l’intérieur de l’École normale, où il était resté maître de conférences. Ces cours intérieurs de l’École, nous ne les avons malheureusement pas ; nous n’en avons qu’un programme[1] dont il serait assez difficile de remplir les cadres ; mais tout ce travail intérieur est venu aboutir au cours de 1818, et c’est en l’étudiant bientôt que nous pourrons nous rendre compte de la doctrine qui était sortie de cette élaboration intérieure.

Quant à présent, ce qui nous paraît le plus important à signaler et

  1. Programme d’un cours de philosophie, 1817, dans les Fragmens philosophiques (1826), p. 228.