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des séminaires ont été complètement, supprimées. Pourquoi, avec cela, la chambre n’a-t-elle pas voté les autres suppressions ou diminutions de crédits qu’on lui proposait? Elle ne le sait pas bien elle-même, et ce qu’il y a de curieux, c’est le rôle de la commission dans cette affaire. Au fond, la commission était défavorable à toutes ces suppressions; malheureusement elle n’a pas pu arriver à se donner un rapporteur. Il n’y a eu qu’un « avocat d’office » pour plaider les circonstances atténuantes. N’importe, la chambre ahurie et incohérente a voté contre les séminaristes. C’est ce qu’on appelle pratiquer la politique concordataire, ou, en d’autres termes, se servir du concordat pour désorganiser les services du culte religieux. C’est la manière nouvelle imaginée par M. Paul Bert, et on n’est pas au bout de cet ingénieux système plein de promesses pour la paix des consciences.

Que des sectaires, à qui un caprice du suffrage universel a donné le droit de saccager la politique et les traditions de leur pays, se livrent à ces étranges fantaisies, usent et abusent de leur pouvoir d’un jour, on le comprend encore, ils sont dans leur rôle. ils ont les passions étroites, les procédés sommaires, la fixité de l’esprit de secte. Ils agissent en fanatiques, non en politiques. Ils ont beau s’essayer à l’habileté et à la tactique, ils laissent trop voir à tout propos qu’ils n’ont qu’une seule préoccupation, celle d’atteindre une religion dans son organisation, dans ses ressources, dans son enseignement, dans ses prêtres, et, s’ils n’ont pas les dragonnades pour ramener les récalcitrans, ils ont de petits manuels à placer pour l’instruction du peuple et des crédits à supprimer dans le budget. On fait ce qu’on peut, selon les temps. — Que des sectaires, disons-nous, agissent ainsi, on ne peut guère s’en étonner; mais, ce qu’il y a d’un peu plus étrange, c’est que le gouvernement lui-même paraisse toujours plus ou moins d’intelligence avec ces sectaires qu’il affecte parfois de désavouer. Nous ne contestons pas que M. le garde des sceaux, ministre des cultes, ait tenté l’autre jour quelques efforts pour défendre le traitement de M. L’archevêque de Paris et les bourses des séminaires. Il a rempli son rôle, il faut l’avouer, assez mollement, en « avocat d’office » toujours prêt aux concessions, hésitant devant une majorité pleine de préjugés. Il s’est préparé, par sa faiblesse, quelques difficultés de plus, et, au lieu d’être réduit aujourd’hui à demander, d’une façon détournée, au sénat le rétablissement des crédits supprimés, il aurait mieux fait de détendre p us résolument son budget devant la chambre. M. le président du conseil aurait pu, lui aussi, trouver là une belle occasion pour une de ces batailles qu’il recherche avec les radicaux. Si on ne l’a pas fait, c’est que le ministre est trop habituellement le complice de ceux qui ont déclaré la guerre au budget des cultes. M. le président du conseil n’a pas voulu, à ce qu’il paraît, accepter M. Paul Bert pour collègue au ministère de l’instruction