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qui les ont représentés au gouvernement n’ont trouvé rien de mieux que de se servir du pouvoir au profit de leurs passions et de leurs fantaisies. Ils ne se sont pas demandé quelles seraient, pour la considération et les relations du pays, les conséquences des lois de parti qu’ils votaient, de la désorganisation de l’armée et de la diplomatie. Ils ont agi, ils ont cru agir dans l’intérêt républicain, sans s’apercevoir qu’ils faisaient exactement le contraire de ce qu’ils auraient dû faire, que par leurs actes, par leurs idées, ils affaiblissaient tous les ressorts de l’organisation française, ils décourageaient des nations amies, ils donnaient des prétextes et des armes à ceux qui ne songeaient qu’à nouer des alliances contre nous. Cette situation diplomatique qui existe aujourd’hui, ils l’ont préparée et ils ne semblent pas même en soupçonner la gravité. L’expérience ne les éclaire pas; ils continuent imperturbablement leur œuvre en ce moment même dans ces discussions qui se déroulent au Palais-Bourbon sur deux points où la prudence et la mesure étaient les conditions premières d’une vraie politique nationale : l’administration morale ou religieuse du pays et les finances de l’état.

Assurément si, dans la situation douloureuse et critique créée à la France par d’incomparables désastres, il y avait l’une nécessité évidente, c’était de s’attacher à une œuvre de conciliation nationale, d’éviter à tout prix tout ce qui pouvait troubler les consciences, diviser les esprits, scinder en un mot le pays. C’était une politique naturelle, indiquée par les circonstances, propre à rassurer et à rallier tous les patriotismes. Eh bien! qu’a-t-on fait? Depuis qu’ils sont au pouvoir, les républicains se sont jetés à corps perdu dans tous ces conflits religieux, qui finissent par devenir aussi puérils que répugnans. Ils ont déclaré la guerre à tout ce qui est croyance ou influence religieuse. Ils sont un peu gênés sans doute par le concordat, qui n’est pas encore aboli : qu’à cela ne tienne, ils trouvent le moyen de satisfaire leurs passions haineuses dans la loi municipale aussi bien que dans une loi sur les instituteurs primaires. La discussion du budget des cultes, qui occupait ces jours derniers la chambre, a été naturellement une occasion nouvelle et toujours attendue de maltraiter quelque peu ce qu’on appelle le cléricalisme. Il s’est trouvé un député affecté de la maladie anticléricale, qui a proposé de tailler, de trancher dans les dépenses ecclésiastiques, et cette chambre, asservie aux préjugés les plus vulgaires, a suivi le mot d’ordre donné par le premier venu. Elle n’a pas voté tout ce qu’on lui proposait, il est vrai, elle a fait ce qu’elle a pu. M. L’archevêque de Paris avait un traitement qui, de tout temps, a été exceptionnel, qui était récemment de 45,000 francs : le traitement de M. L’archevêque de Paris est réduit d’un seul coup à 15,000 francs. Le digne cardinal s’en tirera comme il pourra. Il y avait au budget des bourses affectées aux jeunes gens pauvres qui se destinaient au sacerdoce : les bourses