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leur source. L’anguille a le corps cylindrique et couvert d’écaillés très petites ; elle a la tête comprimée, l’œil petit ; elle se nourrit d’insectes, de limaces, de grenouilles, de poissons et d’écrevisses. Pendant la nuit, elle sort de l’eau et rampe comme un serpent pour chercher sa proie dans les prairies humides. Elle peut atteindre une longueur de 1m,80 et un poids de 4 à 5 kilogrammes; après plusieurs années passées dans l’eau douce, elle descend à la mer en octobre et novembre, en s’abandonnant au courant pelotonnée en boule avec plusieurs individus de son espèce.

L’alose appartient à la famille des harengs et des sardines; c’est un poisson de mer qui fréquente les rivières pour y déposer son frai. Il a le corps comprimé sur les côtés, la tête petite, le des verdâtre et le reste du corps d’un blanc argenté avec deux taches noires derrière les ouïes. Il ne se nourrit pas dans les eaux douces et tire toute sa subsistance de la mer; il est très estimé, à la condition d’être pris avant la ponte, qui a lieu en mai et juin, car, après ce moment, il maigrit beaucoup et s’épuise au point de mourir de faiblesse. Il est tellement abondant en Russie qu’on est obligé de le saler pour en tirer parti, comme d’ailleurs on fait de l’anguille en Italie.

De tous les poissons qui fréquentent nos cours d’eau, le plus important, aussi bien sous le rapport de la taille que sous celui de la qualité de la chair, est le saumon. Habitant la mer, à l’embouchure des fleuves où il se nourrit et se développe, il ne pénètre dans les eaux douces que pour y frayer. Il remonte les courans les plus rapides et franchit les obstacles qu’il rencontre sur sa route en repliant sa queue et en la détendant ensuite comme un ressort. Le choc de l’eau suffit, pour enlever le corps à une grande hauteur et lui faire sauter des barrages de 5 à 6 mètres. S’il manque son coup, il recommence jusqu’à ce qu’il réussisse ou qu’il tombe épuisé. Lorsque la femelle a trouvé un endroit propice, elle creuse dans le lit du ruisseau un nid de 1 à 2 mètres de longueur sur 0m,30 à 0m,40 de profondeur, dans lequel elle se couche et pond ses œufs en même temps que le mâle, placé à côté, répand la laite qui les féconde. Elle les recouvre alors de gravier pour les mettre à l’abri de leurs ennemis et les abandonne à eux-mêmes. Après une incubation qui, suivant la température, varie de quatre-vingt-dix à cent vingt jours, les petits éclosent et conservent encore, comme ceux des truites, pendant trente ou quarante jours la vésicule ombilicale. Une fois celle-ci disparue, l’alevin, qui prend le nom de parr, est en état de se nourrir lui-même. Un an après leur naissance, les parrs changent de couleur, prennent sur le dos une teinte bleue d’acier et azurée sur le ventre. Ils passent alors à l’état de smolts