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de faveur, étaient des lignes stratégiques; la sécurité de la France en dépendait! L’argument décisif à l’appui des conventions devait être produit par le ministre des finances, M. Tirard, qui, après avoir fait l’exposé peu rassurant, mais fidèle, de la situation budgétaire, déclara qu’il n’y avait pas d’autre moyen pour continuer les travaux du troisième réseau. Il n’en fallait pas davantage pour que toutes les conventions fussent votées successivement à une majorité considérable.


III.

Après avoir résumé ces longs débats, il nous est possible de déterminer exactement le caractère des conventions, de préciser la signification des votes et d’apprécier l’influence que les nouveaux contrats sont destinés à exercer sur la situation des compagnies de chemins de fer et sur les intérêts généraux du pays.

Il convient tout d’abord de rappeler que la conception du troisième réseau, le plan de 1879, n’était plus en discussion. Le gouvernement et la chambre voulaient, d’un commun accord, que les chemins de fer tracés dans le programme de M. de Freycinet fussent construits à bref délai. L’engagement avait été pris au nom de la république, la république devait le tenir. Vainement aurait-on essayé de démontrer que l’extension donnée au troisième réseau dépassait toute mesure, il était trop tard pour ressaisir ce qui avait été promis. Vainement encore aurait-on proposé que les travaux fussent ajournés ou ralentis, à raison de la situation financière modifiée par les événemens et surchargée d’autres dépenses que M. de Freycinet n’avait pas prévues ; ce surcroît de dépenses était du fait de la Chambre, qui certainement n’était pas disposée à reconnaître les fautes commises, fautes si lourdes pour sa responsabilité et pour le budget. Dès lors, le gouvernement, sous la pression parlementaire, n’avait plus qu’à chercher les moyens pratiques de construire et d’exploiter le réseau. En présence d’une caisse épuisée et du budget en déficit, l’unique moyen, efficace et prompt, consistait à traiter avec les grandes compagnies.

Les conventions de 1883 ont donc, avant tout, le caractère d’un expédient financier. Elles ne représentent ni un système nouveau en matière de travaux publics, ni l’approbation ou la continuation volontaire du système qui a été pratiqué avant 1870. Le ministre qui les a signées, la majorité de la commission, la majorité de la chambre, ont bien marqué, dans le cours des négociations et des débats, que l’entente avec les compagnies leur était imposée par les circonstances. Un grand nombre des députés qui ont déposé dans