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de la profession. Mais, à côté des tribunaux ottomans, il existe des tribunaux consulaires, seuls compétens quand les parties sont étrangères, et des tribunaux mixtes, chargés de juger les différends qui s’élèvent entre étrangers et Ottomans, composés de trois juges ottomans et de deux assesseurs étrangers. Devant ces tribunaux sont admis les avocats étrangers. Il s’est donc établi à Constantinople une société entre avocats de nationalités diverses, destinée à assurer la défense devant ces juridictions ainsi que devant les tribunaux de commerce. En 1870, ils ont arrêté des statuts calqués sur les règles et les usages des barreaux libres et ont pris pour devise : Forum et jus, la belle citation empruntée par Berryer à Tacite dans une cause célèbre.

Suivant l’ordre des dates, viendrait enfin le Canada avec la réglementation la plus large. Dans la session de 1881, le parlement a voté une importante loi sur le barreau. Une association générale désignée sous le nom de « barreau de la province de Québec » se divise en quatre sections, celles de Québec, Montréal, Trois-Rivières et Saint-François. L’association générale, ou l’ordre, peut faire des règlemens « pour maintenir l’honneur, la dignité, la discipline du barreau, et assurer le contrôle du tableau général des avocats de la province. » Chaque section peut aviser, par des règlemens particuliers, à son administration intérieure. Le conseil général, chargé des intérêts de l’ordre entier, et les conseils de chaque section, sont librement élus par le barreau, et ne relèvent d’aucune autorité dans l’exercice de leur mandat, qu’il s’agisse d’admissions ou de cas disciplinaires. La réglementation entre dans les plus petits détails sur toute chose, mais en cela même elle ne tend qu’à l’indépendance de la profession. C’est pour ainsi dire la codification des traditions de notre ancien barreau appliquée à l’organisation particulière du pays.

Il nous resterait à parler du Brésil et du Portugal, si l’on n’en était encore dans ces deux pays à la période d’élaboration. Dans la session parlementaire de 1880, un projet de loi sur le barreau a été présenté au Brésil par MM. Saldanha Marinho et Baptista Pereira, députés, et renvoyé aux commissions judiciaires. Cette même année, un projet de même nature a été déposé à la chambre des députés portugaise par M. Francisco Beirao. Dans son rapport, il rappelle que l’avocat doit se montrer digne de sa mission par son désintéressement, par son amour de l’étude, par son zèle à défendre les intérêts qui lui sont confiés. « C’est à ce prix, dit-il, qu’il trouvera l’ordre tout entier pour le soutenir dans une attaque injuste. » Il dessine à grands traits l’historique des barreaux étrangers et déclare que c’est à la France qu’il s’est adressé pour trouver le meilleur modèle à suivre. Le développement du projet indique, en effet, que nos