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entamée par le ciseau. On s’en sert pour fabriquer des armoires, des coffrets, des tablettes et divers genres de meubles. L’île Dioscoride produit encore cette Comme sous forme de larmes, qui a reçu le nom de cinabre indien. De même que l’Azanie, l’île Dioscoride reconnaît le pouvoir de Charibaël, roi du pays de l’encens, et celui du chef de la Mopharitide. Les marins de Muza et ceux qui, partis de Lymirice, — en d’autres termes, de la côte de Malabar, — venaient par aventure aborder à ces rivages, commerçaient avec l’île Dioscoride. Ils échangeaient contre l’écaille de tortue, dont ils chargeaient en majeure partie leurs vaisseaux, du riz, du blé, des mousselines de l’Inde, des esclaves femelles, qui, très rares en ce lieu, s’y vendaient aisément. Vers la fin du Ier siècle de notre ère, l’île fut affermée par les rois de la côte arabique, qui y mirent garnison.

Après le promontoire Syagrus, le golfe dont nous avons déjà parlé se prolonge au loin, pénétrant profondément dans la côte d’Oman : sa longueur est bien de 60 milles marins. Puis viennent, sur un espace de 50 milles environ, de hauts rochers dans lesquels les habitans se sont creusé des cavernes, et, plus loin encore, le port désigné pour y déposer l’encens sachalitique. Il Ce port, dit l’auteur du Périple, est le port de Moscha: » nous écrivons aujourd’hui Mascate. Quelques navires y sont envoyés de Cané ; des vaisseaux de Limyrice et de Barygaza, attardés dans leur navigation, s’y réfugient souvent pour y passer l’hiver. Preuve évidente que ces vaisseaux faisaient encore le tour du Golfe-Persique ! Les préfets du roi leur livrent des chargemens d’encens en échange de blé et de mousselines. Sur toute la côte de la Sachalite, on remarque de grands tas d’encens qui ne sont gardés par personne; on s’est contenté de les mettre sous la protection des dieux. Il n’est pas à craindre qu’aucun vaisseau, ni clandestinement ni ouvertement, se hasarde à en détacher la moindre parcelle; le capitaine qui se rendrait coupable d’un pareil acte verrait son navire impitoyablement retenu au port.

A partir de Moscha, entre Moscha et Asieh, la montagne, sur un espace de 140 milles au moins, descend jusqu’à la côte. A l’extrémité de ce rivage abrupt se détachent au large sept îles appelées les îles Zénobies : vous les trouverez encore aujourd’hui à l’entrée de la baie Kurian-Murian. Une autre contrée barbare, qui ne fait plus partie des états de Charibaël, mais qui appartient déjà au royaume de Perse, s’étend ensuite jusqu’à une distance de 200 milles. Là, séparée de la terre ferme par un canal de 10 milles environ, s’élève l’île de Sérapis, qui porte sur nos cartes modernes le nom de Masirah. Cette île a 60 milles de long et 20 à peu près de large. Elle renferme trois bourgs habités par des ichtyophages, — c’est généralement ainsi que les anciens appelaient les pêcheurs de baleines. —