Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 59.djvu/768

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la seconde[1]. Rien de plus naturel, et les adversaires du Vatican ne pourraient s’en montrer étonnés. Le gouvernement italien ne s’y est pas mépris ; la loi même des garanties a prétendu pourvoir à la dignité aussi bien qu’à la liberté du pontife romain. Après avoir signalé les griefs et les argumens des deux parties, il est temps d’examiner ce que valent ces garanties offertes par l’Italie au saint-siège, jusqu’à quel point elles lui assurent ce double bien : dignité et liberté.


II.

Nous ne nous arrêterons pas ici à l’objection préalable, à l’espèce de fin de non-recevoir des défenseurs du saint-siège, lorsqu’ils soutiennent que la loi des garanties ne garantit rien, puisqu’elle peut être supprimée comme elle a été faite, par un vote du parlement. En ce sens, il est vrai, on peut dire que la liberté du pape est à la merci d’une voix de majorité au Monte-Citorio et au Palais-Madama ; d’autant que cette loi de 1871, bien que les jurisconsultes et le conseil d’état l’aient qualifiée de loi fondamentale, n’est pas, strictement parlant, une loi constitutionnelle. Il lui manque, par suite, la solidité des clauses du pacte national ; pour l’attaquer, on peut même s’appuyer sur certains articles du statut. Ce vice originel des garanties pontificales, les défenseurs de la loi italienne sont, en revanche, fondés à dire que la responsabilité en revient surtout au saint-siège et au Non possumus. Si le Vatican y eût consenti, s’il en eût accepté le principe et les bases, cette loi parlementaire eût été volontiers convertie par l’Italie de 1870 en contrat bilatéral, en concordat perpétuel entre la chaire romaine et la jeune monarchie unitaire. L’accord fait entre les deux puissance intéressées, il eût été relativement aisé de lui donner pour sanction un engagement international. Au lendemain de l’occupation de la métropole papale, l’Italie eût, à ce prix, acheté sans marchander la reconnaissance de l’annexion de Rome avec la ratification de la chute du pouvoir temporel et la clôture définitive des longues discussions soulevées par la question romaine. Aujourd’hui qu’elle est depuis treize ans en possession de Rome, après y avoir installé sa capitale sans recevoir de remontrances de personne, après avoir vu les puissances lui laisser régler par une loi intérieure une question qui les intéressait toutes, l’Italie aurait singulièrement plus de répugnance à soumettre à une garantie collective des états ce que la diplomatie a naguère permis

  1. Je citerai, par exemple, l’allocution de Léon XIII aux représentans de la presse en 1879 et son discours au cardinal di Pietro en février 1882.