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individus, le summum de la sagesse. L’Italie se connaît et se juge, et c’est sous l’inspiration de la clairvoyance que lui donne cette connaissance d’elle-même qu’elle cherche les moyens d’assurer le présent, de sauvegarder l’avenir. — Contre qui, et qui les menace ? — Contre la France. Écoutez là-dessus ses hommes d’état, ses penseurs, ses publicistes et surtout ses hommes d’action, soldats et marins : tous pensent, écrivent, proclament bien haut à la tribune, dans la presse, ce que la foule ignorante sent au plus profond de 5a conscience et de son cœur.

Trois ans après la conquête de Rome capitale, — trois ans remplis par des études d’autant plus longues qu’il s’agissait de la péninsule tout entière, — le rapporteur du comité de défense nationale posait en ces termes, dans son rapport au parlement italien, le principe fondamental de la défense du royaume :

« Comme nation, au point de vue géographique, l’Italie a ses frontières tracées de la manière la plus nette par les Alpes et par la mer ; mais, au point de vue politique, sa frontière continentale reste cependant ouverte dans quelques parties du territoire.

« Limitrophe de la France, de la Suisse et de l’Autriche, entourée de tous les autres côtés par la mer, l’Italie, pour pourvoir à sa défense, doit nécessairement se baser sur le développement de ses forces terrestres et maritimes.

« Pour peu que l’on veuille réfléchir un instant à l’éventualité d’une attaque contre notre pays de la part d’une puissance disposant d’une armée solide et d’une forte marine, il sera facile de reconnaître immédiatement à quel point notre défense serait incomplète si l’on négligeait de donner à chacun de ces deux élémens de nos forces le développement qui lui est dû. Supérieurs à notre adversaire sur mer, mais inférieurs à lui sur terre, nous ne parviendrions pas à éviter une invasion de notre territoire par les frontières continentales ; réciproquement, disposant sur terre d’une armée puissante, mais faibles au point de vue naval, nous nous trouverions dans l’impossibilité de nous garantir des attaques et des entreprises ennemies dirigées contre notre littoral si étendu, et nous serions incapables de protéger nos îles ; de plus, notre armée n’aurait pas la liberté d’action nécessaire, attendu qu’elle serait menacée par terre sur les points d’appui de sa base d’opérations.

« Dans les deux hypothèses, on n’aurait pas pourvu de la meilleure manière à la défense du royaume ; et le développement donné à l’un et à l’autre des deux éléments ne suffirait pas à la sécurité de l’état. »

Le problème est posé dans les conditions générales ; cherchons-en les applications.