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en Europe. Depuis que le pavillon russe a été admis, comme les autres pavillons étrangers, dans les ports chinois, ce commerce, qui était très prospère, a sensiblement décliné. L’économie et la facilité des transports par mer ont déterminé les négocians russes à changer de route. Les paquebots sont plus commodes que les caravanes. Les Russes possèdent aujourd’hui des comptoirs à Canton, à Shanghaï, à Hankeou, sur le Yang-tse-kiang, et ils expédient les thés à Odessa. Les échanges par terre, si diminués qu’ils soient, n’en conservent pas moins, d’après des calculs approximatifs, une valeur de 80 millions.

La statistique nous donne ainsi un chiffre total de 1,200 millions de francs pour le commerce de la Chine avec l’étranger ; mais, si l’on veut mesurer exactement l’importance des intérêts européens en Chine, il faut, en outre, tenir compte du cabotage sur les côtes et de la navigation intérieure. Il y a là, par suite de la configuration du pays et de son régime fluvial, une abondance extrême de frets. D’après les relevés fournis par les commissaires des douanes, la valeur des marchandises expédiées ou réexpédiées entre les dix-neuf ports ouverts, s’est élevée, en 1881, à plus de 1 milliard, dont le transport a été effectué, pour les deux cinquièmes, sous pavillon chinois, et, pour les trois cinquièmes, sous pavillon européen. Les cargaisons se composent principalement des produits indigènes qui s’échangent entre le Nord et le Sud, entre les provinces intérieures et le littoral ; elles appartiennent à des marchands chinois, mais le bénéfice du transport revient en majeure partie aux pavillons étrangers, surtout au pavillon anglais, et ce bénéfice est considérable : la plus forte part de la navigation côtière, de même que la navigation au long cours, se fait à la vapeur. La proportion des steamers par rapport aux voiliers a été, pour l’ensemble, de 79 pour 100 quant au nombre des navires et de 92 pour 100 quant au tonnage. Elle parait tout à fait exceptionnelle et elle s’explique par ce double fait que le commerce avec l’Europe passe par Suez et que la remonte des fleuves de la Chine exige l’emploi de la vapeur. — Il nous faut répéter que ces chiffres du cabotage ne concernent que les opérations de dix-neuf ports. Quel accroissement d’intérêts et d’affaires n’est-on pas autorisé à prévoir pour l’avenir, lorsque la Chine, rassurée et confiante, s’ouvrira tout entière, pour son profit comme pour le nôtre, aux entreprises du commerce européen !

Les rapports du Japon avec l’Europe ne remontent qu’à une vingtaine d’années ; nous avons vu à quelles formalités les Hollandais étaient assujettis dans la baie de Nangasaki. Les traités ont modifié cet état de choses en admettant les étrangers dans plusieurs ports[1] ; mais

  1. Voici l’indication des six ports ouverts et le chiffre de leur commerce avec l’étranger en 1881 : Yokohama, 211 millions de francs ; Kobé, 63 millions ; Nangasaki, 17 millions ; Osaka, 8 millions 1/2 ; Hakodato, ! million 1/2 ; Niigate, 0.