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REVUE. — CHRONIQUE.

des Pyrénées, et que les acheteurs de rente extérieure 4 pour 100 à Londres et à Paris se croyaient à l’abri de tout danger, le télégraphe a appris tout à coup qu’une révolte militaire avait éclaté à Badajoz; à peine les dépêches annonçaient-elles la répression de ce premier mouvement, que des insurrections locales avaient lieu sur plusieurs points de la péninsule. Une vive émotion s’est emparée des spéculateurs engagés sur les fonds espagnols. La rente 4 pour 100, cotée il y a peu de jours de 62 à 63, a fléchi vendredi jusqu’à 57. Le lendemain, des nouvelles plus satisfaisantes étaient transmises de Madrid, et dimanche, le télégraphe déclarait l’ordre complètement rétabli au-delà des Pyrénées. Ces informations, purement officielles, ne doivent pas être accueillies sans réserve. Elles ont permis toutefois aux spéculateurs très menacés, surtout à Londres, où la liquidation venait de commencer, de relever les cours de la rente extérieure jusqu’aux environs de 60 et de diminuer ainsi le montant des différences à payer.

La baisse du 4 pour 100 espagnol avait été accompagnée d’un mouvement analogue sur les actions des chemins de fer de la péninsule nord de l’Espagne et Saragosse, et sur celles du Crédit mobilier espagnol. Ces divers titres ont fléchi d’abord de 30 ou 40 francs, puis sont revenus bientôt à peu près au niveau des cours de compensation du 2 août. On avait craint une interruption du trafic et des dégâts matériels sur un certain nombre de lignes. Rien de tel ne s’est produit jusqu’ici.

Les achats se sont naturellement arrêtés sur nos fonds publics aussitôt que les nouvelles d’Espagne ont commencé à circuler, et les vendeurs ont essayé de prendre leur revanche de la défaite subie au lendemain de la liquidation. Ils n’ont pu toutefois ramener le 4 1/2 pour 100 au-dessous de 109; ce fonds reste coté 109.27, ce qui est à peu près son cours le plus élevé ; et les deux 3 pour 100 conservent une avance de plus d’une unité sur les cours de compensation.

On a tenté de mettre à profit le vote des conventions pour organiser une campagne de hausse sur les actions des chemins français, et notamment sur celles de la compagnie d’Orléans, qui ont effectivement dépassé le cours de 1,300 francs, et restent à 1,311 après 1,325. Le mouvement s’est arrêté là, et il est peu probable qu’il soit repris. Si les conventions rendent aux compagnies la sécurité que leur avaient partiellement enlevée des menaces bruyantes de rachat, elles leur imposent, pour une assez longue série d’années, de telles charges en vue de la construction des nouvelles lignes, que les actionnaires doivent renoncer à voir leurs dividendes s’élever avant longtemps au-dessus des chiffres suivans : 80 francs pour le Nord, 60 francs pour le Lyon, 56 francs pour l’Orléans, 50 francs pour le Midi, 35 francs pour l’Ouest et 33 francs pour l’Est. C’est donc sur le taux de ce rendement