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souverain, lorsqu’il demande des satisfactions pour tous ses besoins moraux et matériels, et cela, non pas dans un long délai et à une date reculée, mais dans les limites de la vie quotidienne, et pour ainsi dire, dans l’année qui s’écoule. L’eau salubre qui nous manque, les déjections par lesquelles elle est empoisonnée, la lumière qu’il nous faut, la circulation universelle à établir, les infirmités humaines à soulager partout, les hôpitaux à assainir ou à fonder, non moins que les mairies ou les écoles à bâtir, voilà bien des points principaux de l’œuvre actuelle que la démocratie veut voir s’accomplir dans le plus bref délai possible, et il n’y a aucun motif à lui alléguer pour en différer l’exécution. Depuis qu’on a exclu de partout l’action des individus et mis tant d’obstacles au service de la charité privée en même temps qu’à l’enseignement religieux, c’est sur la communauté entière que le poids tout entier retombe, et Dieu sait qu’il est lourd ! Ce qui se passe à Paris doit en donner une idée ; il ne s’agit rien moins, en effet, que d’y doubler l’approvisionnement des eaux, d’en écarter tous les élémens impurs, d’y établir un chemin de fer métropolitain, de reculer les limites des fortifications, de subventionner la construction de nouveaux quartiers, d’établir partout des écoles communales et enfin de créer de nouveaux hôpitaux dont l’assistance à l’enfance réclame le premier. Sur tous les points du territoire les mêmes besoins existent, les mêmes exigences se produisent, et l’électeur déclare ne vouloir point attendre. Une seule réponse reste à lui faire, c’est que l’argent manque, et que là où il n’y en a pas, le peuple perd ses droits. Comment lui persuader cependant cette absence de ressources? On lui avait fait tant de promesses on l’avait leurré de tant d’espérances! il avait cru sur les affirmations les plus positives à des recettes toujours en augmentation et il s’était lancé dans une production à outrance, comme dans une consommation sans cesse accrue.

Le réveil a été dur, nous l’avons vu, en ce qui concerne les affaires privées, les sociétés de banque, les transactions sur les valeurs mobilières, etc. Mais on revient déjà au calme, quoiqu’on s’abstienne encore parce qu’on se méfie toujours ; s’il se produisait dans les affaires publiques une véritable accalmie, les choses reprendraient leur cours normal. Souhaitons qu’elles ne le reprennent que lentement et sagement.

En attendant que va-t-il advenir des affaires publiques? et, ce qui est le point essentiel, à quelles recettes pourra-t-on recourir pour couvrir ces dépenses exigées par le suffrage universel et qui ne peuvent s’arrêter? Les palliatifs dont on persiste à se contenter suffiront-ils, c’est-à-dire les emprunts temporaires sous tant de formes : emprunts