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ses figures plus d’exactitude ; ses draperies ont plus de naturel. S’il tira parti des progrès réalisés par Piero della Francesca sous le rapport de la perspective, il ne s’appropria pas sa manière et resta purement ferrarais. Dès 1470, il était fixé à Bologne, où l’avaient attiré les Bentivoglio. Avant son départ, il eût pu travailler dans le palais de Schifanoia, car nous croyons avoir démontré que les peintures de ce palais furent commencées entre 1467 et 1470. Toutefois, son style n’apparaît nulle part avec assez d’éclat pour qu’on le nomme sans hésitation devant tel ou tel sujet. En tout cas, nous croyons qu’il n’est pour rien dans les quatre tableaux que lui attribuent MM. Crowe et Cavalcaselle.

Il serait plus surprenant que Galasso Galassi fût resté étranger à l’exécution des fresques du palais fondé par le marquis Albert et agrandi par Borso, car il fut un des peintres attitrés de celui-ci. Dès 1450, on trouve son nom sur les registres de dépense de la maison d’Este. En 1453, il travaillait dans le palais de Belriguardo. Né vers 1423, il mourut en 1473, après avoir passé une partie de sa vie à Bologne. En 1455, il fit le portrait du cardinal Bessarion et peignit pour lui une Assomption dans l’église de Santa-Maria-in-Monte, hors de Bologne. A la Pinacothèque de Ferrare, il est représenté par un Christ attaché sur une croix que soutient le Père éternel, et par une Mise au tombeau. Dans le premier de ces tableaux, si le Père éternel est assez beau, le Christ est tout à fait grimaçant. Dans le second, la figure principale, avec ses cheveux d’un jaune roux, n’a rien d’un Dieu, et les saintes femmes qui l’entourent, laides à l’envi, ont des attitudes gauches et forcées; mais on ne peut regarder sans sympathie le moine ascétique et l’austère évêque qui s’associent de toute leur âme à la douleur des amis de Jésus. Assurément, Galasso est plus archaïque et plus âpre que Cosimo Tura. Ce qui, toutefois, rachète ses imperfections et ses tendances par trop réalistes, c’est l’intensité de l’expression et l’absence de banalité. Reconnaît-on l’auteur des deux tableaux de la Pinacothèque dans les peintures du palais de Schifanoia? MM. Crowe et Cavalcaselle pensent, comme nous l’avons déjà dit, qu’il a coopéré à l’exécution des sujets qui se trouvent dans la zone supérieure au-dessus du Taureau (avril) et des Gémeaux (mai). Ils lui attribuent aussi, toujours dans la même zone, les compositions placées au-dessus du Cancer (juin) et du Lion (juillet), dans la zone intermédiaire le signe du Cancer (juin) et peut-être le signe du Lion (juillet), et dans la zone inférieure le sujet peint au-dessous du Cancer (juin). Ces attributions ne s’imposent pas à l’observateur, mais elles ne sont pas invraisemblables.

A la liste des peintres qui travaillèrent dans la grande salle du palais de Schifanoia, peut-être conviendrait-il d’ajouter Dominique,