Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 58.djvu/400

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

M. Roller, avec une sincérité et une fidélité irréprochables, met aux mains du grand public désireux d’être éclairé sur les premiers temps de l’église tous les monumens écrits et figurés des catacombes et fournit sur leur interprétation, leur caractère et leur chronologie approximative, tous les renseignemens que peuvent souhaiter les curieux, et quelque chose de plus aux dogmatisans. Pour l’église réformée, il comble une lacune et est un progrès ? car c’est la première fois, si je ne me trompe, qu’un protestant a traité des catacombes romaines non-seulement avec cette étendue, mais avec un sens critique aussi ferme. Il est sur nombre de points une réplique à certaines assertions tranchantes et impérieuses du dogmatisme ultramontain. Aux indépendans et aux pars historiens il enseigne la sagesse du doute, qui est le commencement et parfois la fin de la science.

C’est la foi vivante, exclusive, plus chère que la vie, qui a permis au christianisme de vaincre ; c’est la facilité d’accommodation qui lui a permis de devenir une grande institution, de remplacer ou, pour mieux dire, de continuer la civilisation antique. Les cimetières souterrains de Rome portent surtout témoignage de la foi. Le plus grand risque qu’on court en voulant l’expliquer ou l’analyser, c’est de l’enfermer en de trop étroites formules. Sur ce point, M. Roller a écrit dans ses conclusions d’excellentes pages par l’une desquelles je veux finir ce trop long travail :

« Les formes que revêt aujourd’hui le sentiment religieux dans les diverses communions chrétiennes eussent fort surpris les chrétiens des premiers siècles. Qu’indiquent ces façons primitives de comprendre la religion ? Une plus grande simplicité qu’aujourd’hui. Leur ; expression dogmatique n’était qu’ébauchée. La candeur enfantine et joyeuse, éminemment populaire, des décorations des catacombes convenait à merveille à ces déshérités de la terre que le Christ était venu appeler. Les idées simples exprimées en paraboles, comme la sollicitude du bon berger, comme les agapes du royaume des cieux, comme la venue du Messie ou la nourriture des âmes altérées et affamées de justice, voilà ce qui convenait le mieux à ces premières générations de gens du peuple devenus chrétiens…

« Leur foi se réduisait naturellement aux premiers élémens du christianisme, à ces données qui se retrouvent dans toutes les communions chrétiennes, parce quelles sont les plus religieuses et les moins théologiques. Ce n’était pas le lieu, en vérité, de faire du dogmatisme, et voilà l’une des causes peut-être pour lesquelles il est difficile de refaire le Credo précis des chrétiens des deux premiers siècles, surtout d’après les insuffisans renseignemens que nous trouvons sous terre. Il est évident que toutes les communions