Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 58.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

selon moi des subtilités du symbolisme, estime que c’est du système allégorique des docteurs chrétiens d’Alexandrie que le goût des symboles est venu en Occident, a gagné Rome et s’est fixé dans les catacombes. Il croit en outre que ce goût est plus manifeste et plus prononcé dans les plus anciennes peintures que dans les plus récentes, et que ce fut pour l’art chrétien une chute véritable que de revenir à la représentation littérale et grossière des choses. Je prendrais volontiers le contrepied de ces thèses, et sans prétendre traiter ici ex professo la question du symbolisme dans les monumens figurés des catacombes, je veux soumettre à M. Roller quelques observations rapides sur ce sujet.

Qu’en fait, Origène ait traité les Écritures par la méthode allégorique, cela ne saurait être contesté. Que cette méthode soit légitime en tous les cas, et que tous les mystères et profondeurs qu’elle a permis de tirer des livres saints y soient en effet, c’est une autre question et dans laquelle il n’y a pas lieu d’entrer ici. Mais que cette méthode subtile et qui avait senteur de philosophie profane et ne pouvait être goûtée que des savans ait eu vogue en Occident, ait été adoptée par l’église de Rome, si pratique d’esprit et si attachée à la lettre des traditions, qu’elle y soit devenue assez populaire pour s’imposer aux artistes, dicter et régler leurs inspirations, c’est ce qui n’est ni prouvé, ni probable, ni même vraisemblable. Les hérétiques, disons les libres spéculatifs, Syricus ou Alexandrius, venaient sans doute à Rome. Ils y troublaient parfois quelques fidèles par leurs curiosités d’esprit et leur dialectique ; mais le sens droit, bien qu’un peu court, des chefs et des influens de l’église de Rome les repoussait bientôt et leur ôtait tout crédit, Il est permis de croire que les écrits d’Origène qui dépassaient le niveau de la culture moyenne des fidèles d’Occident, furent peu lus dans l’église de Rome, ou tardivement, par les plus savans, et que le grand docteur alexandrin qui ne fit guère que traverser Rome, n’y exerça jamais aucune maîtrise spirituelle.

D’autre part, s’il est vrai que nombre de fresques aient été peintes dans les cimetières souterrains de Rome dès la fin du Ier siècle, dans tout le cours du second et au commencement du IIIe, comme cela n’est pas douteux, et qu’il faille les entendre symboliquement, il est inutile de parler des spéculations des docteurs alexandrins importées à Rome, vu que le symbolisme était déjà inventé et pleinement pratiqué par les artistes des catacombes avant que les spéculations d’Origène eussent vu le jour. M. Roller fait entendre, en effet, que l’art dans les catacombes est d’autant plus symbolique et riche de spiritualités profondes qu’il est plus ancien, et que ce n’est qu’à l’époque où le sens religieux s’appauvrit et où l’art décline,