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résulte aussi que quand un roi ou une reine veulent faire la guerre aux Sakalaves, ils peuvent compter sur leurs soldats.

Formés à cette école, les Hovas sont devenus le plus respectueux des peuples. « Il n’est pas facile pour un Européen, lisons-nous dans un récent ouvrage de M. James Sibree, de se faire une idée juste d’une autocratie aussi absolue que celle qui règne à Madagascar, où chaque indigène, a quelque rang qu’il appartienne, est considéré comme un serviteur du prince et où personne ne peut faire quoi que ce soit, changer de séjour, bâtir une maison ou un tombeau, se marier, entreprendre un voyage, sans en demander la permission à quelque fonctionnaire ou au souverain lui-même. Un tel régime nous fait penser à la monarchie juive et à l’état social décrit dans les livres sacrés. Aussi des paroles telles que ce verset des Proverbes : — La colère du roi est comme le rugissement d’un lion et sa faveur comme la rosée sur l’herbe, — trouvent-elles facilement un écho dans tous les cœurs malgaches. » Peut-être est-il permis d’en conclure que, dans l’habile système d’éducation imaginé par les missionnaires, l’ancien Testament a fait trouver grâce au nouveau dans l’esprit des rois hovas. Il n’était pas difficile de leur faire admirer ce Salomon qui avait trois cents concubines et qui encaissait chaque année 666 talens d’or, sans compter ce qu’il retirait des rois d’Arabie et du trafic des marchands. Salomon a servi d’amorce, le Dieu crucifié n’est venu qu’après. Il n’est que de savoir s’y prendre pour faire avaler aux enfans une pilule dans une dragée.

Il faut rendre justice aux missionnaires anglais. Ils se sont employés activement à réformer les mœurs à la fois relâchées et brutales des Hovas, à les dégoûter et de leurs vices et de la cruauté de leurs lois. Avant eux, on recourait aux jugemens de Dieu et au discernement des crocodiles pour s’assurer de l’innocence d’un accusé. On le contraignait à boire le suc vénéneux du tangena ou on le jetait dans une rivière abondante en caïmans. Il est vrai qu’au préalable on adressait à ces sauriens une éloquente harangue ; on les engageait à se recueillir, à examiner consciencieusement tous les faits de la cause, à ne point faire acception des personnes. C’était trop leur demander, les crocodiles ont une faiblesse pour l’innocent quand il est gras. Les missionnaires n’ont point perdu leurs peines, ces usages féroces sont tombés en désuétude. Ils se sont appliqués également à combattre l’abus du rhum et la polygamie, à rendre le mariage plus sérieux, moins fragile ; ils travaillent à l’extirpation graduelle de l’esclavage. Ils ont beaucoup fait aussi pour l’instruction. Ils ont donné aux Hovas un alphabet, ils ont fondé des écoles très fréquentées, où l’on apprend à lire, à écrire, à chanter de beaux cantiques anglais traduits en beau malgache.

Leur principale étude a été de dégriser ce peuple de ses idoles ou