Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 57.djvu/889

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

proportions de ces trois élémens : eau, alcool, extrait sec, varient suivant les crus. Mais les chimistes ont établi des moyennes au-dessous desquelles ils croient pouvoir affirmer qu’un vin n’est pas bon et marchand. C’est à propos de ces moyennes que le laboratoire municipal a été surtout attaqué. La moyenne exigée est 10 pour 100 d’alcool et 20 grammes par litre d’extrait sec. C’est beaucoup ; il a été facile de citer une multitude de crus et même des meilleurs, où le vin ne contient jamais autant d’alcool. Vous poussez, disait-on, à la fraude. Vous engagez les marchands, qui ne peuvent réaliser des conditions si difficiles, à fabriquer et à mélanger leurs produits, à ajouter soit de l’alcool, soit même de la glycérine ou des sels minéraux pour enrichir l’extrait sec.

On aurait raison si les moyennes étaient invoquées dans tous les cas. Mais, loin de là, les vins ont été séparés en deux catégories : vins dont l’origine est connue et déclarée, — et vins de coupage. Jamais la moyenne n’est invoquée quand il s’agit d’analyser les premiers : on les compare à des échantillons de même provenance. Pour les seconds, ils sont l’objet d’une industrie toute particulière et ce sont toujours ceux-là qui sont mouillés. Les vins coupés introduits à l’octroi ont toujours leur maximum de 15 pour 100 d’alcool et jusqu’à 30 pour 100 d’extrait sec. On les retrouve dans le commerce de détail, réduits à 6 ou 7 pour 100 d’alcool et 15 ou l’6 pour 100 d’extrait. C’est alors le cas d’invoquer les moyennes. Les moyennes adoptées au laboratoire avaient, paraît-il, été fixées par M. Boussingault. De plus, M. Magnier de La Source, qui a écrit sur les vins d’importans ouvrages, aurait trouvé, après deux cent cinquante analyses de vins de coupage, une moyenne de 12 pour 100 d’alcool et 24 pour 100 d’extrait. Sont-elles trop élevées ? Nous n’osons pas nous prononcer, et renvoyons le débat à de plus compétens. Nous devons dire seulement, en fidèle historien, que M. Magnier de La Source s’est plaint il y a quelques mois d’avoir vu ses travaux mal interprétés. Au laboratoire municipal, on évapore les vins à 100 degrés. M. Magnier de La Source a de bonnes raisons de préférer une autre méthode : il évapore à 15 degrés, dans le vide ; il trouve ainsi un dépôt de matières sèches beaucoup plus considérable. Et la moyenne qu’il donne est en réalité inférieure à celle qui est adoptée au laboratoire.

La même discussion s’est élevée à propos de l’examen des laits. Ici encore l’eau joue un grand rôle. Le mouillage du lait est décelé. par le poids devenu insuffisant de l’extrait sec. L’extrait sec du lait comprend le sucre de lait ou lactose, les matières grasses du beurre, l’albumine et le caséum et des sels minéraux. M. le directeur du laboratoire a publié les tables d’un très grand nombre d’analyses,