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changée ; l’enregistrement avait été transporté dans les attributions d’une cour plénière : ; des troubles éclataient dans les pays d’état, en Bretagne et en Dauphiné. Le cardinal de Brienne ayant représenté à Marie-Antoinette que, dans les heures de crise, on doit concentrer le pouvoir afin de lui donner plus de force, se faisait habilement nommer principal ministre. Ce changement n’avait convenu ni à la dignité des maréchaux de Castries et de Ségur, ses collègues, ni à leur façon de penser, encore moins à la considération qu’ils s’étaient acquise. Ils avaient envoyé leur démission. M. de Brienne, frère de l’archevêque, plus fort en intrigues qu’en talens militaires, avait été appelé au département de la guerre. Deux amis du comte de Montmorin restaient seulement avec lui au conseil, M. de Malesherbes, comme ministre d’état, et le comte de La Luzerne, son neveu, grand naturaliste, ancien gouverneur des Iles Sons-le-Vent, frère de l’évêque de Langres, et de l’ambassadeur de France aux États-Unis, envoyé en 1788 à Londres. Si nous mentionnons ces deux personnages, c’est que tous les deux devinrent les hôtes assidus de l’hôtel de la rue Plumet. C’est en y dînant à côté du vertueux Malesherbes que lord Shelburn lui avait dit : « Si je fais quelque chose de bien dans tout le temps qui me reste à vivre, je suis sûr que votre souvenir y amènera mon âme. »

Le comte de La Luzerne, marquis de Beuzeville, avait un fils, capitaine dans les chevau-légers ; ce fils épousa la sœur de Mme de Beaumont, Victoire-Marie-Françoise de Montmorin. Ils eurent deux filles, bien jeunes lorsque leur tante eut à s’occuper d’elles : l’une, la marquise de Floirac, décédée à Paris, le 27 juillet 1858 ; l’autre, la marquise de Vibraye, morte au château de Bazouches, en Nivernois, le 9 mars 1875. — La faveur du comte de Montmorin est au comble. La comtesse de Beaumont est nommée dame pour accompagner Madame, femme du comte de Provence ; la vicomtesse de La Luzerne est, en la même qualité, attachée à Madame Victoire, et la Gazette du 4 novembre 1787 indique que, pour la première fois, elle fait la quête le jour de la Toussaint, dans la chapelle de Versailles, à la grand’messe où assistait la famille royale.

Ayant un rang à la cour, faisant de plus les honneurs du salon de son père, Pauline de Montmorin eut bientôt choisi ses amitiés. Elles furent dignes d’elle.


III

La société française, dans les années 1787-1788, présentait un attrait et un caractère tout particuliers ; ce n’étaient plus les grands salons que l’Europe entière était venue admirer. La mort les avait fermés l’un après l’autre. Il y avait plus que la différence de deux règnes entre