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entraîner cette politique. Le commerce des États-Unis eut à subir les désastreuses conséquences de la guerre engagée entre les grandes puissances européennes. Napoléon Ier avait, par les décrets de Berlin et de Milan, proclamé le blocus continental et ordonné la saisie de tous les navires neutres venant des ports anglais ou chargés de produits anglais. Le gouvernement britannique, de son côté, par les ordres du conseil du 11 novembre 1807, avait déclaré de bonne prise tout bâtiment à destination de l’un des pays d’où le pavillon anglais était exclu, à moins qu’il ne se fût présenté dans un des ports de l’Angleterre et qu’il n’y eût reçu, moyennant le paiement d’une redevance, une licence de navigation. L’accès de tous les ports de l’Europe se trouvait ainsi interdit à la marine des États-Unis, qui avait pris un rapide développement et qui transportait alors sous son pavillon neutre les marchandises de toutes les nations. Mais les Américains se sentirent particulièrement blessés dans leurs intérêts et dans leur orgueil national par la prétention qu’élevait le gouvernement anglais de visiter les navires des nations neutres pour y rechercher et y saisir les déserteurs de sa flotte. Cette pratique vexatoire donna lieu aux plus graves abus : des vaisseaux de guerre furent contraints de subir, aussi bien que des bâtimens marchands, cette humiliante inquisition, et plus de mille matelots d’origine américaine, capturés comme déserteurs au mépris du droit des gens, furent contraints de servir sous le pavillon britannique.

À ces mesures violentes l’Amérique tenta d’opposer, à titre de représailles, un régime de rigoureuses prohibitions.

Au mois de décembre 1807, le congrès, sur la proposition du président Jefferson, vota la loi d’embargo, aux termes de laquelle il était interdit, sous peine de saisie, à tout navire, quel que fût son pavillon, de sortir des ports américains à destination d’un port étranger. C’était, en réalité, supprimer d’un trait de plume le commerce extérieur des États-Unis et donner au système du blocus continental un concours aussi efficace qu’inattendu. Funestes aux intérêts qu’elles prétendaient protéger, de telles mesures ne pouvaient, ainsi que l’avaient dès l’origine annoncé les Fédéralistes, avoir d’autre résultat que de rendre la guerre inévitable. Cette prédiction ne tarda pas à s’accomplir. Au mois de janvier 1812, après d’infructueuses négociations engagées par Madison, le congrès ordonna la levée de vingt-cinq mille hommes de troupes régulières et l’enrôlement de cinquante mille volontaires, et autorisa un emprunt de 10 millions de dollars. Le 19 juin suivant, les États-Unis déclarèrent la guerre à l’Angleterre.

Jackson était alors depuis onze ans major-général de la milice