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ou trois, les autres cinq ou six de chaque côté, d’où un subtil archéologue a conclu que ces vivans symboles venaient sûrement d’un sanctuaire de la Mort ! Rien de plus curieux que de reconstituer, par les spécimens de ces abondantes séries, les divers degrés par lesquels a passé, tout comme le grand art, celui de ces humbles monumens. On y a les types archaïques, avec les reflets d’Orient et le pli de lèvres éginétique, puis les approches de l’influence grecque, les progrès de la forme, la plénitude sans finesse du goût romain, et bientôt la décadence. Plusieurs des problèmes que nous venons de signaler à propos des statues s’imposeraient à qui ferait une étude assidue des terres cuites. Là aussi il y a des mythes à suivre dans leurs développemens et sous leurs divers aspects, des usages religieux et funéraires à interpréter, des vicissitudes de l’esprit public et du goût à retrouver.

Il est clair que les bronzes, les ivoires, les pierres gravées, les médailles représentent autant de branches particulières de la science archéologique. Le meilleur moyen pour acquérir une expérience familière de ces petits monumens, c’est d’en faire, par catégories aussi étroites que possible, des catalogues descriptifs. L’analyse et la définition, qui conduiront à l’intelligence complète et à la synthèse, sont ici, à vrai dire, tout le travail et contiennent les conclusions. L’objet à décrire est-il authentique ? est-il entier ? est-il intact ? ou bien a-t-il subi des altérations, des restaurations, des complémens ? Quelle date faut-il lui assigner, quels lieux de fabrication et de provenance ? quelle place occupait-il au moment et au lieu de la découverte ? que représente-t-il ? Si l’on pense à tout le travail d’élimination et de classification que le catalogue descriptif exige, on reconnaîtra que ce procédé est celui que doivent préférer les jeunes archéologues. M. Collignon l’a pratiqué dans son volume sur les monumens grecs et romains relatas au culte de Psyché ; M. George Lafaye et M. Maurice Albert dans leurs mémoires sur le culte d’Isis à Rome et sur les monumens qui représentent Castor et Pollux[1].

M. Albert a fait paraître dans la Revue archéologique un travail commencé pendant ses années de Rome sur un sujet très attrayant, à propos duquel il y aurait peut-être encore des documens à trouver et des explications à donner. Je veux parler de ces disques de marbre, ronds pour la plupart, sculptés aux deux faces, et qui, suspendus le plus souvent par des chaînes, supportés quelquefois par des pivots à la base, servaient de décoration entre les colonnes des temples, mais après avoir eu dans les âges reculés un sens tout religieux. C’étaient

  1. Dans la Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome.