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force matérielle, toute la région dont chacun des trois cents villages se trouverait être le centre naturel d’attraction[1]. »

D’autres considérations non moins importantes pouvaient être invoquées, au dire de l’honorable M. Thomson, pour témoigner combien était indispensable, à l’heure actuelle, la colonisation de l’Algérie par l’état. « La création de trois cents nouveaux villages, affirmait-il dans son rapport sur le budget de l’exercice 1883 relatif à l’Algérie, constituera le dernier effort de l’état. Ces villages établis, l’initiative individuelle viendrait terminer l’œuvre de la civilisation commencée…[2]. » L’entreprise était grave tout à la fois par le chiure élevé du crédit et par l’étendue des terres à acquérir, parce que, vu la résistance présumée des indigènes, l’administration devrait, dans la plupart des cas, se les procurer par la voie de l’expropriation pour cause d’utilité publique. A l’administration revenait l’obligation de désigner l’emplacement des villages en raison de leur position stratégique plus ou moins susceptible de défense, de la fertilité des terrains à mettre en culture et de l’abondance des eaux nécessaires à l’alimentation des émigrans et de leurs troupeaux ; à elle encore de décider si les terres achetées devraient être mises en adjudication par enchères, vendues sous certaines conditions ou concédées gratuitement, et, dans ce dernier cas, à quelles conditions ; opérations toutes plus délicates les unes que les autres et qui, par suite de leur importance au point de vue du résultat final, ne pouvaient être utilement confiées qu’à la direction unique de l’état. L’honorable rapporteur de la commission n’hésitait pas d’ailleurs à convenir dans ce même document « que l’administration algérienne n’avait pas jusqu’à ce jour fait preuve d’une application suffisante pour surmonter les difficultés qu’il avait mis tant de soin à signaler. Les renseignemens parvenus à la commission établissaient que certains choix inconsidérés, quant à l’emplacement des villages, avaient abouti à de vrais mécomptes ; que le triage à faire dans le nombre des demandeurs ne laissait pas que d’être très embarrassant, et que, dans des circonstances trop fréquentes, nombre de colons sérieux avaient eu à subir les suites fâcheuses des fausses manœuvres, des négligences, des erreurs de l’administration[3]. » Cependant l’honorable rapporteur terminait en concluant que le mieux était encore de continuer de mettre à sa charge une tâche infiniment plus lourde que celle sous le poids de laquelle elle avait jusqu’à présent succombé[4].

On nous permettra de nous dispenser d’examiner la partie

  1. Rapport de M. Thomson à la chambre des députés (séance du 12 juillet 1881).
  2. Rapport de M. Thomson à la chambre des députés (séance du 29 juin 1882).
  3. Ibid.
  4. Ibid.