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trimestre correspondant de l’année précédente, et cette fois, le timbre aussi s’est trouvé en diminution de 216,000 francs. Rien, selon nous, ne permet d’espérer une reprise dans un avenir prochain. Il n’est pas certain que le marché des valeurs immobilières ait touché la limite inférieure de la baisse ; c’est même peu probable. Quant à la bourse, à proprement parler, il y aurait quelque témérité, dans les circonstances présentes, à en attendre une hausse marquée ; peut-être même y aurait-il de l’imprudence à la lui souhaiter. Le mouvement de dépression des fonds publics a été continu depuis quatre ans, et il est dû à des causes trop aisément explicables. En nous reportant à une époque où les bruits de conversion n’avaient pas encore ému et troublé les rentiers et les spéculateurs, au 4 mars dernier, on voit qu’à cette date tous nos fonds étaient notablement plus bas qu’à la même date de chacune des trois années précédentes : le 3 pour 100 cotait, en effet, 81 fr. 35 au 4 mars dernier contre 83 fr. 40 le même jour de 1882, 83 fr. 40 également en 1881 et 82 fr. 55 en 1880. Si le gouvernement sait nous rendre de bonnes finances et une bonne politique, il n’y a pas de doute qu’avec le temps, dans trois ou quatre ans, le marché des valeurs mobilières et des valeurs immobilières aura recouvré de l’animation et de hauts cours ; mais, dans l’intervalle, surtout avec une politique un peu agitée et une sagesse médiocre, le taux d’évaluation des capitaux ne pourra beaucoup s’élever, et, par conséquent, les plus-values de l’enregistrement et du timbre ne sauraient être considérables.

Si nos finances, déjà compromises, sont menacées par les crédits supplémentaires et l’atténuation ou la disparition des plus-values, il y a un vice plus grand, qui a été l’auteur principal des embarras où nous nous trouvons, c’est l’obscurité nouvelle, la confusion presque inextricable des finances publiques, des budgets et des comptes. Depuis 1815, la législation financière s’était proposé d’arriver à toute la clarté possible en définissant avec précision ce que l’on appelle l’exercice budgétaire, en le contenant dans des limites fixes, et en empêchant les exercices successifs d’empiéter les uns sur les autres et d’entrer les uns dans les autres. Tel avait été l’objet des travaux persévérans des admirables ministres des finances de la restauration. Aujourd’hui, il semble que l’on veuille détruire leur œuvre : l’exercice financier n’a plus de bornes ; il se confond avec les précédera et avec les suivans ; il profite de ressources qui ne lui appartiennent pas en propre et il en lègue lui-même aux exercices postérieurs. Cette funeste habitude jette la plus profonde obscurité sur les finances publiques. Elles deviennent aussi compliquées et aussi enchevêtrées qu’elles étaient simples autrefois. En veut-on des