Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 57.djvu/371

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tardifs. Par rapport aux résultats de l’exercice immédiatement antérieur, les impôts indirects avaient donné, en 1875, une plus-value de 158 millions 1/2, une de 56 1/2 en 1876 et une moins-value de 13 millions en 1877. Les plus-values reprirent énergiquement depuis lors : 89 millions en 1878, 57 millions 1/2 en 1879, 70 millions en 1880 et 117 millions en 1881. Cette année clôt la période des vaches grasses : l’année 1882 ne donne plus qu’un excédent de 1 million du produit des impôts relativement à 1881, et l’année 1883 s’annonce comme devant rendre 30 à 35 millions de plus seulement que l’année 1882.

Doit-on penser que la suppression ou le ralentissement de ces plus-values soit temporaire, et doit-on faire fond sur une recrudescence prochaine des augmentations du rendement des impôts ? Certes, ce serait méconnaître absolument les ressources de la France, la puissance de son épargne, les qualités laborieuses de sa population, que de croire que désormais le produit des taxes va rester stationnaire. Mais, d’autre part, bien des indices semblent annoncer d’une manière presque certaine que, dans les deux ou trois prochaines années, les plus-values des impôts n’atteindront pas les proportions énormes qu’on leur a connues de 1878 à 1881. Les causes des plus-values d’impôts peuvent se ramener à trois chefs principaux : d’un côté, l’accroissement de la population, qui multiplie le nombre des consommateurs ; d’un autre côté, l’activité industrielle et commerciale et plus particulièrement l’élan des industries urbaines et notamment de l’industrie du bâtiment ; enfin, l’augmentation de la fortune publique et surtout du taux d’évaluation de cette fortune. Quelques mots sur ces trois points expliqueront qu’on ne puisse compter pour les prochaines années sur des plus-values considérables du produit des taxes. La population de la France est presque stationnaire ; elle s’accroît de 90,000 à 100,000 âmes par an, ce qui n’ajoute que 1/4 pour 100 au nombre des consommateurs des articles taxés ; c’est là, même au simple point de vue fiscal, une grande infériorité par rapport à plusieurs de nos voisins, l’Angleterre, l’Allemagne, le Belgique et même l’Italie. Aussi, dans le premier trimestre de 1883, la plus-value des impôts indirects, par rapport au produit du trimestre correspondant de l’année antérieure, est-elle plus forte en Italie qu’en France. Quant à la seconde cause des plus-values, l’activité commerciale, industrielle et agricole, on ne saurait trop y compter pour les prochaines années. C’est un lieu-commun que l’agriculture souffre ; dans le Midi, elle est encore sous l’influence des ravages du phylloxéra ; dans le Nord, le Centre et l’Ouest, elle a pâti d’une série de mauvaises récoltes, de la difficulté de trouver des ouvriers, et elle a dû subir, en outre, par suite de la concurrence étrangère, des prix de