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réduira seulement à 140 millions au lieu de 150 le déficit de l’exercice 1883 et à 110 ou 115, au lieu de 145 ou 150, le déficit de 1884, elle aidera en outre, si l’on y joint d’autres moyens qui demandent plus de persévérance et de résolution, au rétablissement graduel de nos finances.


II

Il faudra, en effet, une forte dose de résolution et de persévérance pour restaurer nos finances aujourd’hui si ébranlées et si enchevêtrées. Ce n’est pas quelques points de détail qu’il faut modifier, c’est tout le système. On doit revenir à la pratique prudente de 1872 à 1877. Toute l’administration s’est depuis lors relâchée. La prodigalité des chambres et l’affaiblissement de la prospérité publique ont été de pair. Les preuves de cette vérité abondent. Voyez ce qu’étaient de 1874 à 1877 les crédits supplémentaires. La fermeté des ministres et la tempérance du parlement les maintenaient dans des limites raisonnables. Le budget définitif des dépenses de 1874 ne dépasse que de 37 millions 1/2 le budget primitif ; l’écart entre les deux budgets est de 82 millions 1/2 en 1875, il s’élève par exception à près de 144 millions en 1876 et il revient à 51 millions en 1877. Dans ces quatre années, les dépenses réelles n’excèdent que de 315 millions les dépenses prévues, soit une moyenne de 78 millions 1/2 par exercice ; c’était, eu égard à la faiblesse humaine, une proportion raisonnable. Combien elle est dépassée depuis lors ! En 1878, l’écart entre le budget définitif des dépenses et le budget d’évaluation atteint le chiure colossal de 327 millions 1/2 de francs ; en 1879, il est encore de 240 millions ; en 1880, il s’abaisse passagèrement à 124, il remonte à 182 millions en 1881, et, en 1882, le dernier exercice écoulé, mais non encore complètement clos, les dépenses réelles, d’après les déclarations récentes de M. Tirard, auront dépassé de 243 millions au moins les dépenses prévues dans le budget. Les cinq années de la période 1878 à 1882 auront offert au monde ce spectacle inouï qu’en pleine paix les budgets définitifs auront excédé de 1 milliard 116 millions en chiffres ronds les budgets de prévision, ce qui représente un écart moyen de 223 millions entre le budget définitif et le budget primitif. Cet écart est deux fois et demie plus grand que celui que l’on constatait dans la période, cependant beaucoup plus laborieuse et plus critique, de 1874 à 1877.

En même temps que la moyenne des crédits supplémentaires ou extraordinaires triplait, les plus-values, atteignant d’abord des chiffres merveilleux, finissaient par s’éteindre presque complètement, si bien qu’elles devenaient insuffisantes pour parer aux crédits