des budgets de toutes les nations civilisées. Or, les ressources ordinaires de l’année 1882, le dernier exercice connu, ne se sont élevées qu’à 2 milliards 904 millions de francs ? Si l’on s’en tenait à ce terme de comparaison, le budget de 1884 serait avant sa naissance, en déficit de 199 millions, on peut dire en chiffres ronds 200 millions. Nous accordons que la situation pourra être moins mauvaise. Il est vraisemblable que les impôts en 1884 donneront une certaine plus-value relativement à 1882 ; mais peut-on espérer que ces plus-values soient fortes ? D’après une statistique dressée par le ministère des finances et insérée dans le rapport de M. Ribot sur le budget de 1883, la progression des impôts indirects de 1872 à 1881 est de 3. 05 pour 100 par année. Mais il s’en faut que cette progression soit continue et uniforme ; elle procède par saccades ; or, comme elle a été singulièrement accentuée dans la période de 1875 à 1881 inclusivement, et notamment dans cette dernière année, il est vraisemblable qu’elle sera beaucoup plus lente de 1882 à 1884 ou 1885 inclusivement. C’est ce qui se manifeste dès maintenant. L’année 1882 n’a donné que 1 million de francs de plus que l’année 1881, et les trois premiers mois de 1883, qui fournissent une moins-value relativement aux évaluations budgétaires, ne donnent que 8 millions de plus que les mêmes mois de 1882. En estimant à une quarantaine de millions la plus-value que l’on peut raisonnablement espérer d’une année à l’autre, on trouve que les recettes ordinaires de 1884 pourront dépasser de 80 millions environ celles de 1882 ; c’est-à-dire que les recettes du prochain exercice s’élèveraient à 2 milliards 984 millions en chiffres ronds ; les prévisions de dépenses étant dès à présent de 3 milliards 103 millions, le déficit monterait à 118 ou 120 millions. Il faut y joindre les crédits supplémentaires, qui dans une certaine mesure sont inévitables ; l’on arrive alors à un déficit probable de 150 millions. Il est vrai que, pour atténuer ce déficit, on compte ou l’on comptait sur différentes ressources ayant un caractère extraordinaire et que l’on glissa habilement dans le budget ordinaire. L’une de ces ressources, est une somme de 17 millions de francs empruntée aux reliquats des exercices antérieurs, c’est-à-dire en réalité à la dette flottante ; une autre ressource qui n’est pas normale et à laquelle il va peut-être falloir renoncer, c’est un remboursement de 35 millions à attendre des compagnies de chemins de fer sur les avances que l’état leur a faites à titre de garanties d’intérêt. Que les compagnies de chemins de fer soient en situation de rembourser au trésor 35 millions en 1884, rien ne le fait supposer. En 1881, les compagnies ont remboursé 18 à 19 millions, à savoir : l’Orléans 10 millions, le Midi un peu plus de 6 et l’Est quelques centaines de mille francs. Les recettes nettes des compagnies ont été moindres en 1882 qu’en
Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 57.djvu/367
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.