Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 57.djvu/366

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le sens opposé. On les a évaluées à 3 milliards 44 millions de fr., mais voici que les trois premiers mois donnent 5 millions de moins-values. Dira-t-on que ce mécompte est exceptionnel, dû à des circonstances passagères, que la fin de l’exercice compensera la faiblesse du début ? Rien n’autorise à l’admettre. Les faits qui ont causé ces moins-values sont trop connus pour qu’on puisse espérer un changement prochain. La vraisemblance est donc que les trois derniers trimestres ne seront pas plus favorisés que le premier, et que la moins-value des impôts, qui fut de 5 millions pour celui-ci, atteindra 20 millions au moins pour l’ensemble. Le chiffre des recettes de l’exercice s’affaissera ainsi, suivant toutes les probabilités, à 3 milliards 24 millions. Le chiffre des crédits est dès maintenant de 3 milliards 87 millions ; l’écart, c’est-à-dire le déficit provisoire au moment où nous écrivons, atteint la somme déjà notable de 63 millions. En réalité, le déficit est supérieur : on a porté, en effets au budget ordinaire des recettes de l’exercice 1883 une ressource importante, — 32 millions, — empruntée aux reliquats des exercices précédens, c’est-à-dire en définitive à la dette flottante : cette ressource ne peut pas être considérée comme normale et ne devrait pas trouver de place dans un budget ordinaire ; voilà donc le déficit réel, l’insuffisance des recettes ordinaires et propres à l’exercice pour couvrir les dépenses ordinaires et propres à l’exercice, qui s’élève de 63 millions à 95. Mais ce dernier chiffre même, suivant toutes les probabilités, sera notablement dépassé. Nous n’avons tenu compte dans les calculs qui précèdent que des crédits supplémentaires déjà votés ou soumis aux chambres, soit de 43 millions. Dans toutes les années précédentes, ces crédits tardifs ont singulièrement dépassé cette somme : en 1882, ils ont atteint 220 millions et 181 en 1881. Nous espérons que la chambre se montrera plus prudente que dans les récentes années ; nous avons quelque droit de faire fond sur la fermeté de M. Tirard, qui depuis quelques mois fait montre de résolution ; néanmoins ce n’est pas soudainement qu’un prodigue devient économe, et il est peu vraisemblable que les crédits supplémentaires ou extraordinaires de 1883 restent fort au-dessous de 130 ou 140 millions. Admettons que les annulations de crédits en fin d’exercice réduisent ce chiffre de 50 millions, il restera encore une cinquantaine de millions à ajouter aux dépenses déjà votées et soumises aux chambres ; le déficit de 1883, que nous voyions tout à l’heure monter à 95 millions, atteindra par conséquent 145.

Les perspectives de 1884 ne sont pas beaucoup plus réjouissantes, Le budget se présente avec un ensemble de crédits de 3 milliards 103 millions, chiffre qui est absolument inconnu dans l’histoire