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les murs du château. Cet entraînement débute par des promenades au pas progressivement prolongées, durant lesquelles les fonctions des poumons et du cœur, qui sont sœurs, se régularisent et s’apprêtent à de plus grands efforts. Puis ces promenades au pas sont variées par des temps de galop, dont la rapidité se mesure sur la facilité de respiration des animaux. Enfin ces exercices subissent une accélération qui doit être ménagée avec un grand tact, afin de ne pas dépasser et même de ne pas atteindre la limite de résistance des organes de l’animal.

C’est charmant de voir ce peloton d’une trentaine de poulains bondissant sur la piste, montés par de jeunes palefreniers dont la veste rouge se détache vivement sur la verdure des châtaigniers. Parfois l’écart d’un cheval précipite à bas son cavalier. L’enfant limousin se relève, court, rejoint sa monture et saute en selle, léger comme un Numide.

Au retour à l’écurie, les animaux sont soumis à de vigoureuses frictions, sorte de massage qui délasse le corps, en aidant les muscles à se débarrasser des substances résultant de leur usure par le travail. C’est, en effet, la présence de ces résidus dans les tissus qui cause la fatigue.

Sous l’influence de cette gymnastique graduée et d’une alimentation substantielle, le jeune cheval perd l’empâtement du poulain nourri de grasse herbe; ses lignes s’allongent, le poitrail prend un merveilleux développement en profondeur et en largeur.

Après une année d’entraînement, les pouliches sont envoyées à la jumenterie pour y servir à la reproduction, et les poulains, tant arabes qu’anglo-arabes, sont répartis entre les divers dépôts d’étalons. Les produits les plus brillans sont ceux qui résultent des jumens anglaises et des chevaux de Syrie. Dotées par leur mère d’une grande ampleur de formes, ils reçoivent de leur père un sang excessivement sain qui vivifie le tempérament trop souvent scrofuleux dans la descendance des bêtes de course. La régénération des victimes de l’hippodrome par l’infusion du sang arabe est du reste tentée en Angleterre même. Quelques éleveurs y ont repris les procédés qui ont si bien réussi à leurs devanciers du siècle dernier. Il ne faut pas être grand prophète pour prédire le prochain avènement des anglo-arabes sur le turf.

Inférieurs en distinction, les produits purs arabes de Pompadour paraissent supérieurs aux croisemens anglais par la solidité de leur construction et par la bonté de leur caractère, qualité transmissible et très appréciable dans le producteur de chevaux de service. Très vigoureusement musclés, ces arabes conviennent le mieux aux poulinières bretonnes si répandues au sud de la Loire, et qui, sous