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et en étalons arabes pour la contrée du Midi. En outre, l’établissement vendait périodiquement l’excédent de ses pouliches que les éleveurs recherchaient avec empressement, pour en faire des poulinières d’élite. C’est ainsi que la production de l’état fournissait de précieux élémens à l’élevage privé.

Mais l’œuvre devait être anéantie au moment où elle commençait à s’affirmer par les services rendus. L’effectif, qui dépassait une soixantaine de poulinières, subit en 1852 une réduction considérable, prélude de la suppression complète qui eut lieu quelques années plus tard. Pour la troisième fois Pompadour voyait disperser au feu des enchères une réunion sans pareille d’animaux d’élite qui allèrent en grande partie enrichir les haras de Russie, d’Allemagne.

Cette regrettable mesure causa la désolation des éleveurs du Centre et du Midi. Elle fut une intempestive application de vues systématiques sur la suppression des haras, qui firent un certain tapage à cette époque. Certes, il convient que l’action de l’état soit le plus réservée possible dans les choses de l’industrie; toutefois il est des entreprises, telles que la création d’une race de chevaux d’élite, qui exigent de grandes ressources d’argent et de vastes domaines. Ces conditions, la puissante aristocratie anglaise peut les réaliser; mais elles ne sauraient se trouver aisément et avec suite dans notre démocratique société. Du reste, la création d’une race améliorante de l’espèce commune concerne notre puissance militaire à un trop haut degré pour que l’état n’ait pas à s’en préoccuper directement, à l’exemple de ce qui se passe chez toutes les puissances continentales sans exception. Au fond, en supprimant la jumenterie de Pompadour, on se préoccupait peut-être moins d’assurer le triomphe de principes économiques que de faciliter la vente lucrative des fruits secs du turf.

Dans tous les cas, cette perturbation allait paralyser la reconstitution de la production chevaline, dans le Centre et dans le Midi. Rehaussés en valeur et en vigueur par l’introduction du sang oriental, les chevaux de cette région avaient déjà fait un progrès marqué vers le type du trait léger, transformation indispensable pour rendre désormais l’élevage rémunérateur. Peu coûteux à nourrir, peu exigeans de soins, ils avaient pour clientèle assurée la classe si nombreuse des petits bourgeois de ville et de campagne. Ils convenaient également par leur énergie au métier plus pénible des relais de poste; ils y résistaient plus longtemps que les lymphatiques chevaux du Nord, si rapidement usés par les chauds climats. On n’a point oublié la vaillance de ces attelages transportant si rapidement les voyageurs sur les routes aboutissant aux Pyrénées, Quel