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celui dans lequel ont été excavées les catacombes de Rome. Un premier couloir d’entrée donne accès à deux larges galeries parallèles entre elles, l’une plus longue que l’autre, qui y débouchent perpendiculairement ; d’autres leur succédaient plus avant dans les entrailles de la colline et sont obstruées par des éboulemens; on n’y a point pénétré, et elles réclameraient des fouilles régulières, qui probablement donneraient des résultats intéressans. Dans les deux galeries principales que l’on visite s’ouvrent à droite et à gauche des chambres plus ou moins profondes. Les parois des galeries et des chambres sont partout percées, comme celles des catacombes chrétiennes et juives de la campagne romaine, de ces niches horizontalement allongées et peu profondes, juste suffisantes pour recevoir un corps, que l’on appelle des loculi, et des niches plus grandes désignées par le nom d’arcosolia, qui dessinent un cintre au-dessus d’un sarcophage ménagé dans le tuf, sarcophage qui est ici toujours à deux ou trois places. En outre, le sol des galeries et des chambres, dans les catacombes de Venosa, est partout creusé de fosses serrées les unes contre les autres qui ont dû recevoir encore une nombreuse population de morts. Toutes ces sépultures, dans les parois ou dans le sol, sont béantes. Les dalles de pierre ou les briques scellées qui les fermaient originairement ont été arrachées par des mains impies, soit celles des gens qui ont fouillé clandestinement les galeries il y a trente ans, soit celles de dévastateurs plus anciens. Il n’est pas possible d’arriver à des renseignemens précis à cet égard. On a perdu de cette manière, il n’en faut pas douter, bien des inscriptions instructives, bien des documens du plus haut prix pour l’histoire. Mais il reste encore dans le fond des arcosolia des chambres donnant dans la galerie la plus étendue, sur l’enduit blanc dont on avait revêtu le tuf, un peu plus d’une quarantaine d’inscriptions tracées au pinceau en couleur rouge. Il y en a de latines, de grecques et d’hébraïques. Celles des deux premières classes sont écrites avec assez de soin, en grandes lettres capitales, dont la forme dénote l’époque, Ve et VIe siècle de notre ère, le temps où nous avons les témoignages littéraires les plus précis sur les juifs d’Apulie et leur grand nombre. L’hébreu est aussi d’un type ancien, fort précieux pour la paléographie.

Le latin des épitaphes de la catacombe est barbare ; il présente toutes les corruptions du langage populaire, dont il devient ainsi un monument. Les cas de la déclinaison y sont complètement brouillés et les mots contractés, altérés d’une manière curieuse. On lit, par exemple : Absida ubi cesquit Faustinus pater pour Absis ubi quiescit Faustinus pater. Le grec n’est pas moins corrompu, et dans les fautes d’orthographe qui y fourmillent on sent l’influence de la lourde