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LES
ANNEES D'APPRENTISSAGE
DE M. DE BISMARCK

M. de Bismarck n’a pas voulu laisser à la postérité le soin de lui ériger sa statue comme elle l’entendrait ; il a préféré qu’on la commençât de son vivant, afin de pouvoir diriger lui-même le travail et s’assurer qu’on avait attrapé sa ressemblance, qu’on le montrait bien au monde tel qu’il désire lui apparaître. Après sa mort, ses biographes n’auront qu’à suivre les indications qu’il a bien voulu leur donner d’avance, et ils lui sauront gré des peines qu’il a prises pour leur faciliter leur tâche. Il avait déjà permis qu’on livrât au public une partie de sa correspondance intime, et voici qu’avec son aveu et peut-être à sa demande, la direction des archives de Berlin a entrepris de publier en trois volumes toutes les dépêches et les lettres qu’il adressa à son gouvernement lorsqu’il représentait la Prusse à la diète germanique. Les deux volumes qui ont déjà paru sont aussi curieux qu’instructifs. Assurément il y est question de beaucoup de petits incidens depuis longtemps oubliés. Peu nous importent les crises que la révision de la constitution provoqua en 1853 dans la principauté de Lippe-Detmold, et nous nous soucions médiocrement d’approfondir dans ses menus détails la mélancolique histoire de cette fameuse flotte allemande, dont les six derniers vaisseaux furent vendus à la compagnie du Lloyd. En revanche, rien n’est plus intéressant que de connaître par des documens authentiques les débats du chancelier de l’empire allemand dans