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remorquant le reste, l’activité des transactions redeviendra assez grande pour que l’on puisse dire que la Bourse de Paris a repris enfin son ancienne physionomie.

Le sort de l’opération qui va être tentée n’intéresse donc pas seulement le Crédit foncier ; il y a en jeu un intérêt général ; aussi est-il naturel que toutes les précautions aient été prises pour que rien ne compromette l’heureuse issue de la tentative. On avait parlé d’abord de la constitution d’un syndicat de garantie formé des grands établissemens de crédit. Mais cette combinaison entraînait pour le Crédit foncier et, par conséquent, pour le public prêteur, d’assez gros sacrifices, rendant nécessaire le maintien du prix d’émission à un niveau élevé. Le Crédit foncier se trouvait mieux couvert, mais l’émission elle-même courait de plus grands risques, et il y avait à craindre que la précaution ne devînt par là plus qu’inutile, vraiment nuisible.

On a dû renoncer à l’idée d’un syndicat. Mais le Crédit foncier a obtenu un concours dont la puissance équivaut à la plus solide garantie. Il paraît avéré que M. de Rothschild, à la suite de négociations heureusement menées avec l’établissement émetteur, s’est fait inscrire comme le premier souscripteur des obligations nouvelles, pour un nombre de titres fort respectable. D’autres groupes de souscripteurs importans, composés, dit-on, de grands entrepreneurs, ont été formés, en sorte qu’une notable partie de l’emprunt se trouve déjà placée avant l’émission. Enfin les grands établissemens de crédit ouvriront leurs guichets et recevront les souscriptions de leur clientèle. C’est au 25 courant qu’a été fixée la date de l’émission.

La nouvelle de l’entente entre M. de Rothschild et le Crédit foncier, mise en circulation dès le commencement de la semaine, n’a commencé que jeudi à produire sur le marché un effet salutaire. Pendant les trois journées de jeudi à samedi, la rente 5 pour 100 a été relevée de 75 centimes, les deux 3 pour 100 de 25 à 30 centimes, le Crédit foncier de 20 francs, le Suez de 50 francs, la Banque de France de 40 francs. Ces valeurs sont les seules qui aient été l’objet, durant la première quinzaine de janvier, de transactions un peu suivies, et cela dans les derniers jours. Le mouvement sur le 5 pour 100, dû surtout à des rachats du découvert, a été mené un peu brusquement et suivi d’une légère réaction. Il y a lieu de penser toutefois que l’amélioration s’accentuera la semaine prochaine et prendra un caractère plus général.

Dans l’ensemble, on a pu constater que les affaires avaient été rarement aussi peu actives que depuis le 1er  janvier. La liquidation s’est effectuée sans peine pour les fonds publics, mais dans des conditions assez laborieuses pour un grand nombre de valeurs. Bien des positions à la hausse qui subsistent encore, malgré tant de motifs de découragement, se voient de plus en plus discutées, et la situation