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plusieurs statues antiques; quand elle met au jour, creusant la terre en avant de la Farnésine, cette maison romaine avec stucs et peintures qui est devenue à elle seule tout un musée ; quand les travaux d’isolement du Panthéon, remettant en place de beaux bas-reliefs décoratifs, offrent à l’imagination de l’historien et de l’artiste de nouveaux élémens de calcul et d’étude. C’est fête quand M. de Rossi dirige une visite aux catacombes ou dans les musées du Vatican; que sera-ce le jour où un témoignage public sera décerné à l’illustre archéologue ?


Bien peu de savans doués d’un plus heureux ensemble de fortes qualités ont su mieux ranger à leur service de plus magnifiques instrumens d’étude. ne Romain et n’ayant jamais cessé d’habiter sa ville, en possession des ressources qu’offrait l’ancien système de haute éducation dans l’état pontifical; très ingénieux à combler, s’il y en avait, les lacunes; maître en une large mesure, par une pratique privilégiée et familière, par un appareil considérable de notes logiquement disposées, par une vaste et ferme mémoire, — de tant de documens précieux, manuscrits inconnus, dessins inédits, — que possèdent des archives incomparables; roi incontesté de la Rome souterraine, et plus sûr que le héros de la Fable de renouveler toujours ses forces en invoquant la terre; aidé dans son œuvre par une force de travail, un talent de conception et d’imagination critique, une habileté de mise en œuvre tout à fait rares, M. de Rossi a depuis longtemps sa place parmi les plus remarquables esprits de notre temps ; et il est facile de prédire que sa renommée, déjà si étendue, grandira encore, à mesure que les résultats qu’il a conquis pénétreront dans le domaine commun de la science.

Le mérite d’un premier projet de démonstration publique en l’honneur d’un tel maître revenait au révérend père Bruzza. Ce savant religieux, aussi respecté dans Rome pour son talent que pour son caractère, auteur d’un volume bien connu d’épigraphie latine et de beaucoup d’excellens mémoires, a fondé depuis quelques années, à Rome, une académie d’archéologie chrétienne que M. de Rossi dirige et inspire avec lui. Deux fois par mois durant la saison d’hiver, dans la modeste salle basse du couvent de san Carlo in Catinari, on se réunit autour d’une table. Le père Bruzza préside; il ouvre la séance en présentant quelque objet récemment trouvé dans les catacombes; il lit à ce propos une note érudite; ses élèves, qui le sont également de M. de Rossi, ajoutent le compte-rendu par écrit ou de vive voix de leurs derniers travaux; quelque étranger lit une étude sur un sujet non prévu, et, à chaque occasion, M. de Rossi improvise les plus riches souvenirs pour comparer, confirmer ou douter. C’est là qu’il