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rapprochées des anciens rivages ou établies dans des dépressions délaissées par la mer et que les eaux douces venaient naturellement remplir. Mais tous les points non occupés par celle-ci étaient aussitôt recouverts d’une riche végétation. C’est ce qui résulte de l’étude du bassin de Saint-Étienne, bien que nous nous abstenions volontairement d’entrer ici dans de nouveaux détails. Selon M. de Lapparent, on distinguerait une double série de bassins discontinus qui jalonneraient les flancs de la région primitive, l’une extérieure constituée par le Creuzot, Blanzy, Saint-Étienne, Alais, Graissessac, Decazeville, etc., l’autre intérieure, relativement à la première, partant de l’Allier et se prolongeant par Commentry, Saint-Eloi et la Haute-Dordogne. Ces derniers bassins répondaient évidemment à des lacs d’une moindre étendue, comme les lacs intérieurs de la Suisse comparés à ceux de Genève, de Constance et de la Haute-Italie. La mer se montre à la base de quelques-uns de ces bassins avec l’étage que l’on nomme « anthracifère » et qui précède dans l’ordre des temps l’étage carbonifère propre ou étage producteur par excellence. Elle se retire ensuite inévitablement pour céder la place aux dépôts houillers dans lesquels la mer ne joue évidemment aucun rôle. Il en est de même à l’ouest, vers la Vendée, la Bretagne et la Normandie ; nulle part, on peut le dire, la mer n’est absente, elle a laissé presque partout des vestiges ; mais au moment du développement le plus énergique des conditions auxquelles est due la production de la houille, elle s’éclipse et se retire, refoulée par les eaux douces et par la végétation terrestre, dont ce retrait vient agrandir le domaine.

Sans vouloir prolonger outre mesure ces études, ni promener le lecteur en Allemagne, en Bohême, en Russie, en Amérique, les traits que nous venons d’esquisser suffisent ; ils attestent la physionomie et les caractères généraux du sol et des terres lors de l’époque qu’il s’agissait de définir. La production de la houille se trouvait certainement en rapport avec l’extension des terres relevées au-dessus du niveau de la mer. Ces terres, après leur émersion, constituaient des ceintures littorales qu’une différence de niveau assez faible séparait de l’élément océanique refoulé. Sur des plages à peine inclinées, les eaux douces envahissaient presque aussitôt les points déprimés, tandis que les plantes prenaient possession de tous ceux que l’émersion mettait à leur entière disposition.


V.

Il est temps de rechercher maintenant comment les choses se passaient au sein de ces régions parsemées de cuvettes lacustres