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en même temps qu’une nouvelle cause de désunion et des germes de discorde sociale auraient encore porté le trouble dans notre pays déjà si cruellement éprouvé.

Revenons à nos chiffres. Le budget général de l’état pour l’exercice 1883, présenté par M. Say, et amendé par la commission, s’élève pour le budget ordinaire à 3 milliards 44 millions, pour le budget extraordinaire à 258 millions[1], pour le budget sur ressources spéciales à 377 millions, auxquels s’ajoutent 84 millions 1/2 de budgets annexes rattaches pour ordre au budget général de l’état, ensemble 3 milliards 764 millions.

L’honorable rapporteur de la commission du budget à la chambre des députés, M. Ribot, faisait remarquer en présentant cet énorme total, que le budget des dépenses ordinaires ne s’élevait, à la dernière année de l’empire, en 1869, qu’ai milliard 621 millions, et que l’accroissement qui le portait aujourd’hui à plus de 3 milliards avait été surtout très rapide dans les trois dernières années ; entre 1880 et l’exercice prochain l’écart n’est pas inférieur à 296 millions. « Nos dépenses ordinaires, disait-il, depuis plusieurs années ont suivi une progression qui s’explique par la nécessité de procurer une satisfaction à de grands intérêts sociaux, comme l’instruction publique, ou d’améliorer la situation des serviteurs du pays. »

C’est pour les mêmes motifs que les budgets départementaux, qui ne comprenaient à l’origine qu’un très petit nombre d’articles (exposé des motifs de M. Goblet sur l’organisation des cantons), s’élèvent à plus de 220 millions, et c’est aussi pour organiser en un point central des écoles primaires supérieures, des établissemens de bienfaisance cantonaux, etc., que l’avant-dernier ministre de l’intérieur appelait le canton à prendre dans notre organisation administrative une place aussi importante que le département, et proposait, en conséquence, la création d’un nouveau budget, le budget cantonal, dont les ressources eussent été prises, pour la plus grande part, sur les centimes communaux.

Quel que soit le sort réservé au projet de loi de M. Goblet, il faudra bien que les communes paient les nouvelles dépenses que les grands travaux, l’instruction et la bienfaisance réclament. Or elles n’ont pas, comme l’état, la faculté de recourir à une dette flottante

  1. Le budget des recettes extraordinaires a été réduit à 258 millions parce qu’on a proposé d’appliquer aux dépenses de cette nature 271 millions de ressources provenant des reliquats de crédit des exercices antérieurs et 257 millions des remboursemens des avances faites aux compagnies de chemins de fer. Puisque le nouveau ministre des finances renonce à cette dernière ressource, le budget extraordinaire devra être relevé d’autant par une nouvelle émission de bons du trésor, ou par un emprunt, à moins que l’on ne diminue les travaux publics en projet.