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marché, tel était le cri de ralliement, et pendant huit jours les deux ennemis des masses radicales furent saint Vincent de Paul et feu M. Dubochet, qui n’avait jamais dû s’attendre à pareil honneur.

Presque tous les membres de l’ancien conseil furent réélus. Ils revinrent animés des mêmes sentimens et liés par des engagemens nouveaux. Ils avaient promis de chasser les derniers religieux enseignans, ce qui était peu équitable, mais très facile, et d’abaisser le prix du gaz de 5, de 10 ou de 15 centimes, suivant les quartiers : tâche plus méritoire, mais beaucoup moins commode, surtout pour ceux qui avaient déclaré une guerre sans merci au monopole et juré de ne le proroger à aucun prix.

Les élections amenèrent cependant quelques changemens. M. Martial Bernard fut rendu responsable du projet auquel son nom était attaché, et ne reparut point au conseil. Le petit groupe conservateur gagna trois sièges. Les conservateurs venaient au conseil avec la très ferme résolution de protester sans relâche contre toute mesure blessant leurs consciences, mais ils avaient également résolu de ne point borner leur rôle à protester. Ils voulaient prendre une part active aux travaux et aux affaires, et il est juste de reconnaître que jamais la majorité ne leur a refusé ni l’entrée d’aucune commission, ni l’honneur de présenter des rapports importans. Cette courtoisie envers la minorité devrait servir d’exemple à d’autres assemblées, où elle n’est point en usage.

À la commission de la voirie, on reprit l’étude des traités. On s’aperçut d’abord que la commission scientifique était sortie de son rôle en se mêlant de les interpréter. Les chimistes de M. le ministre de l’intérieur s’étaient faits jurisconsultes. Le traité ayant été renouvelé en 1870, ils avaient décidé que l’examen des progrès ne devait pas remonter au-delà ; ils refusaient le nom de procédés nouveaux aux perfectionnemens, aux tours de main (c’est l’expression du rapport) qui ont assuré de si beaux profits aux fabricans de gaz. On pourrait, disait la commission, tirer le gaz de la tourbe ou des huiles minérales, on l’a essayé ; ce seraient là des procédés nouveaux. Mais on se contente de distiller la houille : vieux procédé. Enfin, il ne fallait pas s’occuper des sous-produits : c’était une industrie annexe, étrangère à l’industrie du gaz, dont les progrès étaient seuls visés par le traité. Cette commission de savans tranchait des questions de droit, et donnait une consultation au lieu de faire une expertise.

Il était d’ailleurs aisé de répondre. Les modifications introduites en 1870 dans le traité ne touchant en rien l’article qui traite de l’abaissement éventuel du prix, cette disposition reste donc datée de 1855 ; elle est simplement recopiée en 1870. L’interprétation du mot procédé nouveau est trop étroite : à ce compte, depuis Papin et sa