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proposé d’ancrer des navires par de grandes profondeurs et de les mettre en relation avec la côte par un câble sous-marin ; mais en supposant qu’on réussît à vaincre les difficultés du mouillage à la profondeur de 1,000 ou 2,000 mètres, il serait encore malaisé de maintenir le câble électrique en bon état. On a pu s’en convaincre en 1869 : l’amirauté anglaise avait permis de mouiller le navire de l’état le Brisk, à titre d’essai, vers l’entrée de la Manche ; l’expérience dut être abandonnée au bout de six semaines, et elle coûta à ses promoteurs, nous dit M. Scott, « autant de mille livres sterling que le Brisk passa de jours à la mer. »

Pour diminuer les frais et les risques de ces entreprises, quelques savans, comme M. Morse, ont proposé que ces stations flottantes, ne fussent pas pourvues d’équipages, mais seulement d’appareils enregistreurs en communication électrique avec une station du littoral. Enfin, tout récemment, on a mis en avant un autre projet qui ne laisse pas d’être séduisant : c’est le système de « télégraphie superocéanique » imaginé par M. Ernest Menusier ; L’inventeur propose de jeter un câble entre Saint-Nazaire, Bordeaux et New-York, avec embranchement, au milieu de l’océan, sur Panama ; de 60 lieues en 60 lieues, il greffe sur ce câble principal, un câble vertical soutenu par urne bouée et deux branches en croix de 10 à 20 lieues, terminées aussi par des câbles verticaux suspendus à des bouées. Ces bouées, qui portent des numéros d’ordre, forment ainsi trois lignes parallèles sur la route des paquebots transatlantiques ; on peut admettre qu’en moyenne chaque navire en rencontrera une par jour. L’extrémité libre des câbles verticaux est disposée de manière à pouvoir être facilement mise en communication avec les fils de l’appareil télégraphique installé à bord des navires, et l’on conçoit que, par ce moyen, un échange de dépêches puisse s’établir entre les navires en route et les ports de départ ou d’arrivée. Des postes centraux échelonnés, en manière de relais, sur des îles ou sur des navires solidement amarrés, faciliteraient l’organisation de ce réseau télégraphique et postal à la surface de l’océan. Les difficultés pratiques qui semblent, à première vue, s’opposer à l’exécution de cette conception hardie me resteront pas toujours invincibles au génie de nos »savans. Entre temps, il faut souhaiter qu’on se décide à poser entre l’île Maurice et la Réunion le câble électrique que M. Bridet ne cesse de réclamer : il permettrait à l’observatoire de Port-Louis d’avertir notre colonie, dix-huit ou vingt-quatre heures d’avance, de l’arrivée d’un cyclone et de lui épargner ainsi beaucoup de désastres.

Quand le réseau d’observations, dont les mailles se complètent et se resserrent chaque jour, embrassera toute l’étendue de notre hémisphère, on pourra sans doute aborder avec succès les