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quelques-uns des ouragans les mieux étudiés, il admet que, dans un rayon de 250 kilomètres, il tombe 200 millions de kilogrammes d’eau par seconde. Avec une hauteur de chute de 300 mètres, cela donnerait un travail moteur de 800 millions de chevaux, fourni par la pesanteur ; mais la condensation de la vapeur d’eau qui produit ces averses dégage 120 milliards de calories, par seconde, dont l’équivalent mécanique ne représente pas moins de 660 milliards de chevaux ! C’est plus de mille fois la quantité de travail qu’exige la respiration du cyclone. Le poids de la vapeur entraînée par l’air qui entre dans le cyclone, et qui se refroidit en s’élevant, ne dépassera pas 6 ou 7 millions de kilogrammes ; cependant sa chaleur de condensation représente encore au moins quarante fois le travail exigé.

On voit par ces chiffres que le réservoir de force vive capable d’alimenter l’ouragan ne fait pas défaut : mais ce que la théorie de l’aspiration laisse dans l’ombre, c’est la manière dont cette riche provision de chaleur est convertie en travail mécanique et employée à produire le mouvement de rotation et de translation.

Dans les tornades, notamment, la vitesse de rotation peut atteindre 100 mètres par seconde, et la vitesse de procession est parfois celle d’un train express ; pour expliquer ces mouvemens violens, il faut toujours revenir aux grands courans atmosphériques, dont la vitesse, dans les régions supérieures, paraît être toujours considérable. Par l’observation des cirrhus, on a trouvé assez souvent des vitesses de 150 kilomètres à l’heure, et parfois 200 ou 250 kilomètres. On sait aussi que M. Bollier, parti en ballon de Paris, le 24 novembre 1870, fut forcé de descendre, quatorze heures après, dans les montagnes de la Norvège, et qu’à un certain moment, à l’altitude de 4,000 mètres, la vitesse du ballon était de 30 lieues à l’heure. Quand ces courans descendent à la surface et qu’ils y rencontrent des courans dirigés en sens contraire, on conçoit sans peine qu’ils donnent naissance à des tourbillons d’une violence extraordinaire. C’est l’impulsion d’un irrésistible flot d’air concentrée subitement sur un seul point. « La trombe, dit à ce propos, M. Faye, est un simple organe de transmission de la force ; c’est un outil gigantesque qui recueille en haut la force vive dans son vaste entonnoir et qui l’amène en bas en la concentrant sur un petit espace pour la dépenser contre l’obstacle du sol. » Que les courans à l’intérieur du tourbillon soient d’ailleurs ascendans ou descendans, c’est une question qu’il sera permis de réserver. Il en est de même du rôle qu’il convient d’attribuer à l’électricité dans la production de ces phénomènes, et qui pourrait bien être, pour les trombes en particulier, le rôle principal. Malheureusement l’origine de l’électricité atmosphérique, dont la tension paraît augmenter avec