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dont elles formaient les premières mailles s’étendit rapidement et couvrit bientôt toute l’Europe. Les documens qui s’accumulaient ainsi étaient soumis à une discussion de plus en plus approfondie, surtout depuis que le service météorologique avait été confié à M. Marié-Davy, et dans le Bulletin du 23 novembre 1863 on trouva pour la première fois une carte synoptique de l’état de l’atmosphère à la surface de l’Europe. Les « cartes du temps » sont aujourd’hui familières à tout le monde. Ce qui s’y voit de plus caractéristique, ce sont les courbes appelées isobares ou lignes d’égale pression : elles réunissent les points où le baromètre atteint le même niveau. Des flèches empennées y indiquent la direction et la force des vents ; on y inscrit aussi la température, et des signes de convention représentent l’état du ciel aux diverses stations. C’est par l’étude de ces cartes qu’on arrive, ainsi que nous l’expliquerons, à prévoir les perturbations qui menacent nos côtes.

En Angleterre, les premiers essais d’avertissement ont été faits en 1861. Déjà, à la réunion de l’Association britannique pour l’avancement des sciences à Aberdeen, en 1859, une résolution avait été adoptée en faveur de l’organisation d’un service de cette nature. Un mois plus tard, la perte du Royal Charter, sur la côte d’Anglesey, vint fournir un puissant argument aux partisans du service projeté. Au commencement de l’année 1862, le système des avertissemens, tel qu’il avait été conçu par l’amiral Fitzroy, se trouvait définitivement établi. Le succès ne répondit pas d’abord à l’attente du public ; c’est que les avis étaient formulés d’une manière trop vague. L’amiral, lorsqu’il signalait une tempête, entendait qu’elle pouvait arriver pendant les soixante-douze heures suivantes ; les signaux, arborés le matin, étaient amenés le soir, mais l’avertissement devait compter pour trois jours, et si, dans l’intervalle, la situation s’améliorait, il n’y avait pas moyen d’annoncer ce revirement aux marins qui avaient été inquiétés par une fausse alerte. Après la mort de l’amiral Fitzroy, survenue en 1865, son successeur, M. Robert H. Scott, a réorganisé le service météorologique sur un plan plus rationnel. On n’annonce plus que les tempêtes complètement déclarées, et les signaux ne sont amenés que lorsque tout danger a disparu. Aussi le succès des avertissemens est-il devenu plus satisfaisant.

Comme les bourrasques se transportent en général de l’ouest à l’est, il est clair que les pays qui forment la rive orientale de l’Atlantique, — les Iles-Britanniques, la France, le Portugal, — sont beaucoup plus exposés que le reste de l’Europe à être surpris par les gros temps. Une des conséquences de cette situation, c’est que les avertissemens que le Meteorological Office de Londres peut envoyer à Hambourg, par exemple, sont en général plus sûrs que ceux qu’il