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la Question des impôts, nous avons dit qu’aujourd’hui plus que jamais les impôts devaient être considérés au seul point de vue économique, la question de la répartition étant secondaire, et disparaissant par le fait de la répercussion. Un impôt est-il un obstacle sérieux au progrès de la richesse, il faut le supprimer ; ne l’entrave-t-il en rien, il faut le conserver. Tous les impôts, assurément, sont une charge ; mais parmi eux il y en a qui ne sont réellement pas un obstacle au progrès de la richesse, qui s’y associent parfaitement et qu’on paie sans s’en apercevoir ; ce sont les meilleurs et les seuls que dans un pays bien organisé économiquement on doive conserver ; il n’est pas difficile de les reconnaître. Il y en d’autres, au contraire, qui semblent avoir pour but de tuer la poule aux œufs d’or, qui sont comme une barrière qu’on aurait élevée à dessein pour arrêter le développement de la prospérité publique. Tels sont, entre autres, nous l’avons déjà dit, l’impôt de mutation de 6 1/2 pour 100 qui exerce un effet désastreux sur le mouvement de la propriété, et celui de 23 pour 100 qui frappe les transports à grande vitesse sur les chemins de fer. Ce dernier impôt rapporte à l’état 80 et quelques millions. Mais ce qu’il coûte à l’industrie des transports, la charge particulière dont il grève les marchandises et qui se répercute de l’une sur l’autre, sont choses incalculables ; nous ne serons certainement pas au-dessous de la vérité en disant qu’il coûte bien cinq fois plus qu’il ne rapporte. S’il était abaissé à 5 pour 100, l’état trouverait bien vite sous d’autres formes la compensation de ce qu’il aurait perdu. Voilà des impôts antiéconomiques qu’on peut supprimer en tout état de choses, parce qu’ils nuisent au progrès de la richesse ; mais en dehors d’eux, il n’y a pas et il n’y aura pas de longtemps de dégrèvement à faire. Nous devons conserver surtout l’impôt foncier qui, en réalité, n’est pas lourd et ne gêne pas les transactions. Nous avons besoin aussi de toutes les taxes de consommation, contre lesquelles on se récrie beaucoup, mais qu’on n’a jamais démontré être un obstacle au progrès de la richesse. Ce à quoi il faut songer aujourd’hui, c’est à l’amortissement.


II

L’amortissement dans le budget de 1883, comme dans les budgets précédens, consiste à rembourser les obligations qui ont été émises pour le fonds de liquidation et qui arrivent à échéance. Il y en avait pour 170 millions en 1883. Afin d’alléger la situation, M. Léon Say proposait d’en éloigner le remboursement pour partie et de n’affecter que 103 millions au remboursement de ces obligations. La commission a été plus sévère et a cru devoir ajouter 32 millions, laissant 35 millions à couvrir par la plus-value des recettes. Ainsi