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et absence de surveillance encore plus grandes qu’en Angleterre. Les élèves ne sont astreints qu’à une seule obligation : avoir leurs rooms dans l’intérieur de l’université; mais aucune heure n’est fixée pour leur rentrée du soir. Ils ne sont point obligés, comme à Oxford, de prendre, en principe du moins, leurs repas dans le dining hall du collège, ni d’assister le matin à un court service religieux qui sert à constater leur présence. Impossible, vis-à-vis de jeunes gens de dix-huit à vingt ans, de pousser plus loin le principe du self control. Mais on s’attache aussi à leur fournir tous les moyens de distraction possible, et les exercices du sport sous tous les formes jouent un grand rôle dans leur existence. On ne s’imagine pas, comme en France, que savoir le grec et monter à cheval, faire des vers latins et tirer l’épée, lire et ramer soient choses incompatibles. Quels sont les résultats de l’éducation ainsi donnée sur la généralité des étudians, je n’en sais rien ; mais ce que je sais, c’est que les hommes les plus distingués de l’Amérique, l’historien Prescott, le philosophe Emerson, l’orateur Everett, le poète Holmes ont compté au rang des sophomores de l’université d’Harvard.

J’ai eu un peu plus de loisir (au train dont nous allions, une matinée c’était beaucoup) pour visiter les écoles publiques de la ville de Boston, qu’un membre de la commission scolaire, qui est en même temps le directeur du musée, a mis infiniment de bonne grâce à me montrer. Les écoles publiques et gratuites de Boston se divisent en primary schools, qui répondent à peu près à nos salles d’asile ; grammar schools, qui répondent à peu près à nos écoles primaires ; et high schools, qui ne répondent à rien de ce que nous avons chez nous. Cependant, dans les primary schools, les enfans restent jusque vers huit ans, et dans les grammar schools jusque vers quatorze ans, c’est-à-dire dans les unes et dans les autres environ deux ans de plus que les enfans ne restent chez nous. C’est dire qu’un jeune garçon ou qu’une jeune fille de Boston qui n’a reçu que l’enseignement primaire en sait nécessairement plus long qu’un garçon ou qu’une jeune fille de Paris. C’est à dessein que je rapproche ces deux villes, car les écoles de Boston ont une grande réputation en Amérique et celles de Paris sont incontestablement celles où l’enseignement est poussé le plus loin en France. Cependant, à parcourir les deux programmes, je n’y ai pas vu de différences bien saillantes, sauf peut-être que les matières récemment ajoutées chez nous au programme de l’enseignement primaire, quelques notions d’histoire naturelle et de physique, et quelques principes de droit constitutionnel, figurent depuis longtemps dans le programme de l’enseignement primaire américain et y tiennent une plus grande place. En posant quelques questions aux enfans, en examinant quelques cahiers de devoirs, il ne m’a pas