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Mayolas. Mais, en somme, sa relation est plate, comme il convient au genre, et ce n’est pas ces vers-là que nos gazetiers durent trop envier à La Fontaine.

Çà et là, d’ailleurs, malgré la médiocrité de leur style, ces rimeurs rencontrent l’expression juste et pittoresque. Robinet parlera des dames « de diamans éclairées, » à qui Monsieur, la veille, offrit un cadeau. Ailleurs, il commencera le compte-rendu de la représentation d’un opéra devant la cour par ces vers qui ne manquent pas d’une certaine majesté :


Quand ces divinités visibles
Eurent pris séance en leur rang…


Mayolas, décrivant une chasse dans le parc de Versailles dira que :


Le jour sembloit filé de soie ;


et racontant un concert donné dans ce parc après le spectacle, il terminera joliment :


Violons, hautbois et musique…
Avec le grand jour atirèrent
Ou, pour mieux dire, réveillèrent
Les Rossignols du fond des bois…


Mais ces rencontres sont rares. Ce même Mayolas, annonçant le supplice de conspirateurs anglais, conclut que


… les plus rudes châtimens
Sont dûs aux mauvais sentimens.


Ces deux vers nous rappellent un passage d’une complainte célèbre, la Complainte de Fualdès :


Car de Rhodez les habitans
Ont presque tous des sentimens ;..


C’est, en effet, le style de la complainte que parlent d’ordinaire Mayolas et Robinet, et Boursault lui-même et Subligny ; aussi n’ont-ils pas à baisser le ton pour nous raconter le duel de deux dames à propos d’un petit chien, la mésaventure d’un cocher ivrogne qui passa la nuit dans la rue, la mort d’un chirurgien tué par la chute d’une cheminée, celle d’un jeune homme blessé par l’imprudence d’un pédicure.

Dans tous ces passages, leur style est bien celui de la complainte qui réclame l’accompagnement de l’accordéon, — et, si cette muse est celle des cours, on se demande en vérité desquelles !

Mais ce n’est pas le talent de ces gazetiers qui fait leur prix à nos