Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 53.djvu/142

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Somme et de plus de 5 millions d’hectolitres en autres céréales ! Les procédés de culture en général aujourd’hui usités dans le même département, dans l’Aisne, dans le Pas-de-Calais, forment un mélange des pratiques de la culture anglaise et de la culture flamande qui constitue une sorte d’originalité et qui profite à la production. La betterave est devenue la source nouvelle, depuis un demi-siècle, d’une immense richesse. La Somme à elle seule en cultive environ 36,000 hectares, qui ne produisent pas moins de 1 million d’hectolitres. Le Nord en a fait une de ses principales richesses. Les cultures oléagineuses ont pris un développement malheureusement menacé depuis quelques années. La richesse de la Picardie en animaux, depuis la basse-cour jusqu’aux animaux d’espèces chevaline, bovine, ovine et autres, ne s’est pas moins accrue. Naguère, on évaluait dans la Somme le nombre des chevaux, ânes et mulets à près de 77,000 ; le Marquenterre et le Vimeux élèvent des poulains de race normande et boulonnaise ; le chiffre des bœufs et vaches grasses était de près de 132,000. L’Aisne avait environ 87,000 chevaux, ânes et mulets, 162,000 bœufs et vaches, environ 830,000 moutons, dont le produit en laine était énorme : l’élève du mouton a souffert depuis peu d’années. Les autres parties picardes de l’Orne et du Pas-de-Calais donnent des résultats analogues, dont des souffrances momentanées ne sauraient infirmer la valeur. La Flandre, on peut le dire, s’est surpassée elle-même. Elle égale ce que l’Angleterre a de plus avancé comme perfectionnemens agricoles. Une statistique récente accusait l’existence d’une production de 7 millions d’hectolitres de blé, de 168,000 chevaux, de 277,000 bœufs et vaches de la belle race flamande. Le bétail n’est pas seulement plus nombreux, il est plus pesant. On nourrit infiniment mieux qu’autrefois. Les moutons dans le département du Nord, moins nombreux, nous l’avons reconnu, sont énormes. Dans cette plantureuse contrée, où tout croît, végétaux et bêtes, d’une merveilleuse manière, les porcs sont volumineux et regorgent de graisse, les volailles sont d’une grosseur étonnante. La puissance prolifique n’est pas moins considérable, exceptionnelle. La Flandre a une surabondance de vie matérielle prodigieuse : mais ce que l’homme y a ajouté n’est pas moins extraordinaire. Il a tout accru, tout multiplié. Suffit-il d’arguer de quelques épreuves récentes pour parler de mort et de décadence ?

Quant à la crise agricole à laquelle nous avons fait plus d’une fois allusion, nous n’avons pas à traiter ici de ses causes et de ses remèdes. On l’a fait d’ailleurs bien des fois. Ce n’est pas le lieu de traiter de la nécessité de dégrever l’agriculture du surcroît d’impôts qui pèsent sur elle. Il n’y a rien de plus urgent. Mais nous n’attendons rien pour elle du jeu des tarifs. Elle ferait mieux de s’opposer aux primes excessives de l’industrie manufacturière que d’identifier