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parlement use de la faculté d’accroître sans cesse les dépenses, une fois le budget fixé, est de nature à jeter une véritable perturbation dans notre état financier. Il n’est pas de conversion possible si l’imprudence de la chambre continue à compromettre l’équilibre du budget.

Les valeurs turques et égyptiennes ont assez bien soutenu le choc des nouvelles fâcheuses transmises quotidiennement du Caire et de Constantinople. Elles ne pouvaient toutefois manquer de payer tribut aux dispositions peu favorables que manifestait le recul des fonds français. Le 5 pour 100 turc, qui en mai s’était avancé jusqu’à 13.60, a rétrogradé peu à peu jusqu’à 12.25, cours qui a provoqué d’assez nombreux rachats. La Banque ottomane, dont l’assemblée générale va se réunir le 22 courant, à Londres, et dont les directeurs doivent proposer, si les événemens ne modifient pas d’ici là leur décision, la répartition d’un dividende de 37 fr. 50 pour l’exercice 1881, a été ramenée au-dessous de 800 francs. Mais les acheteurs défendent énergiquement leurs positions sur cette valeur dont la destinée, à leur avis, ne doit pas être étroitement associée aux oscillations des fonds ottomans. Quant à l’obligation unifiée, malgré la gravité des faits dont Alexandrie vient d’être le théâtre, elle a fléchi seulement hier au-dessous de 340 ; il est douteux, si la baisse s’accentue, comme il est probable, que la spéculation puisse maintenir les gros engagemens qu’elle a pris à la hausse sur ce titre, à Londres et à Paris.

Le 5 pour 100 italien par contre a été à peu près immobile au-dessus de 90.50. Le général Ignatief ayant quitté le ministère de l’intérieur à Saint-Pétersbourg, les fonds russes se sont immédiatement relevés à Saint-Pétersbourg. En résumé, les fonds étrangers auraient fait en général très bonne contenance si des nécessités de liquidation n’avaient fait abandonner, dans la journée d’hier à Londres, à bon nombre de spéculateurs, des positions devenues intenables sur l’obligation unifiée. La fermeté de cette valeur, par suite des efforts au prix desquels elle était obtenue, constituait et constitue encore un véritable danger pour l’équilibre de la place.

Si les événemens d’Egypte n’inspiraient pas de justes alarmes au monde financier, il est probable que le taux de l’escompte aurait été déjà abaissé. La situation de la Banque de France, accusée par le dernier bilan, est, en effet, excellente. L’encaisse or, grâce aux accroissemens qui se succèdent régulièrement depuis plusieurs mois, s’élève à 944 millions, portant le total de l’encaisse à 2 milliards 102 millions. L’excédent de la circulation sur l’encaisse métallique n’est plus que de 569 millions. Les bénéfices du premier semestre permettraient à la direction de la Banque de répartir un dividende de beaucoup supérieur à celui du semestre correspondant de 1881, mais il est probable qu’une partie des profits sera mise en réserve, la diminution du portefeuille laissant prévoir que les six derniers mois, tout en donnant d’excellens