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qui recouvrent aujourd’hui ces derniers ; mais la plupart proviennent des érosions produites par les courans sous-marins dans les dépôts des matières accumulées dont elles attestent la puissance. A mesure que l’écorce terrestre se souleva, la mer diminua de profondeur ; en se retirant, elle creusa des vallées et laissa comme des témoins de sa présence des lacs qui remplirent les dépressions. Les vallées servirent de canaux d’écoulement aux eaux des pluies, et les crevasses qui se produisirent dans l’écorce terrestre ouvrirent à ces eaux de nouvelles issues. Le même phénomène s’est reproduit sur d’autres points du globe, car la plupart des continens doivent leur naissance à des soulèvemens analogues tantôt brusques, tantôt lents. Quand le soulèvement a été brusque, les lacs ont des bords abrupts et déchirés comme en Suisse ; quand il a été lent, ils sont nombreux et de forme arrondie comme en Finlande et en Afrique. Tous ces lacs se dessèchent peu à peu à mesure que le soulèvement, en se prononçant davantage, force les eaux à s’écouler vers les niveaux inférieurs ; comblés d’autre part par les matières entraînées par les torrens, ils deviennent des plaines qu’une simple rivière suffit à drainer.

Les pluies périodiques, qui, dans l’Afrique centrale, tombent sur une surface convexe à pentes peu prononcées, suivent d’abord une direction incertaine. Elles ne sont pas, comme dans le bassin de l’Amazone, qui est adossé à une immense chaîne de montagnes, entraînées immédiatement par un fleuve impétueux à pente rapide et bien accentuée ; elles forment d’abord une multitude de ruisseaux au cours indécis, qui ne vont rejoindre les rivières principales qu’après des méandres et des circonvolutions sans nombre. C’est au point qu’un même lac alimente souvent des cours d’eau entraînés dans des directions opposées.

Dans l’Afrique australe, où le dessèchement est plus avancé, la plupart des rivières ont un caractère torrentiel ; à sec, pendant une grande partie de l’année, elles s’enflent subitement au moment des pluies ou des orages et passent en quelques minutes d’une profondeur de quelques centimètres à une profondeur de 10 ou 15 mètres. La crue est si rapide qu’il n’est pas d’année où des campe-mens, installés dans leur lit desséché, ne soient engloutis. Certains cours d’eau s’évaporent et se perdent dans les sables ; tel est le cas du Kuraman, qui sort d’un rocher en état de faire tourner un moulin et qui, après plusieurs disparitions, finit par se réduire à un mince filet. Quelle que soit la situation des terrains sur lesquels elles tombent, les eaux des pluies s’écoulent toujours vers la mer, lentement ou rapidement, superficiellement ou souterrainement ; mais plus ces terrains sont élevés, plus cet écoulement se fait vite,