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en eux la liberté de conscience; pour les autres qui sont en bien plus grand nombre, on s’arrangera toujours avec eux : on leur passera au besoin la faiblesse de prendre honnêtement Dieu à témoin, et nous voilà bien avancés avec un projet ministériel qui, s’il est adopté, aura institué le serment facultatif et libre.

Disons le mot ; ce prétendu progrès laïque, qui n’est que le déguisement d’une guerre de secte aux influences religieuses est tout simplement le dissolvant le plus actif de l’ancienne société française, et le ministère en s’y prêtant, fait œuvre de faiblesse, de complicité subordonnée, rien de plus. Qu’espère-t-il? Il se promet sans doute de vivre. Il compte, en flattant quelques passions, faire tourner à son profit ce mouvement bizarre, presque violent, qui s’est déclaré contre M. Gambetta. Il aurait une position et une force bien autrement sérieuses s’il montrait plus de résolution, et il en trouve la preuve en lui-même, Dans sa propre expérience. M. le ministre des finances en entrant au pouvoir, a fait ses conditions aussi nettement que possible dans intérêt du crédit et de la situation économique du pays. Ces conditions, il les a maintenues sous le feu de toutes les attaques peut-être même en dépit des dissidences de quelques-uns de ses collègues. Si avait paru céder, il aurait été abandonné de toutes parts; il a tenu ferme, et il est arrivé à avoir ne commission du budget, , avec laquelle tout ne lui sera pas encore facile peut-être, mais qui, du moins, accepte la plupart de ses projets, les parties essentielles de son programme financier. Pourquoi l’exemple ne servirait-il pas ? pourquoi la fermeté qui parait se faire respecter dans les finances ne réussirait-elle pas dans la direction des affaires morales et politiques du pays?


Heureusement, tous les nuages qui passent au printemps sur l’Europe, sans parler de la France, ne sont pas des orages, et tout ce qu’il peut y avoir de malaises, d’incohérences ou de difficultés dans l’état du monde ne conduit pas nécessairement à des crises nouvelles, à des ruptures imminentes.

Des antagonismes de races, des rivalités d’ambitions, des obscurités ou des troubles de diplomatie, des agitations ou des manifestations suspectes, il y en a pour sûr en Orient comme en Occident, et, à ne voir que sous cet aspect les affaires de l’Europe, il resterait toujours de quoi ménager à notre vieux continent un certain nombre de surprises. Sans doute, il est connu, il est assez visible que tout n’est pas pour le mieux dans le monde, qu’il y a entre la Russie et ses puissans voisins d’Autriche et d’Allemagne de vives défiances, que le panslavisme ne cesse d’agiter l’Orient, que la Turquie elle-même en est à chercher fortune dans tous les pays de l’islam que les affaire de l’Egypte restent fort obscures et que les affaires de Tunis ne sont rien moins que réglées. On n’a que le choix des difficultés, qui, avec