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non plus seulement l’ordre gouvernemental, mais l’ordre social tout entier, sont ourdis par une vaste association d’agitateurs qui, ayant abdiqué l’idée de la patrie, se transportent partout où se présente la possibilité d’un bouleversement et qui, aussitôt après la ruine de leurs criminelles entreprises, vont reformer leurs rangs sur le territoire de l’état le plus voisin ; la société ne reprendra sa sécurité que lorsque toutes les nations de l’Europe interdiront l’abus de l’hospitalité aux conciliabules de ces agitateurs errans, et c’est au gouvernement qu’il appartient de les discerner des vrais défenseurs de la liberté et de la nationalité des peuples, au milieu desquels ils se trouvent trop souvent confondus. » On voulut donc que le ministre de l’intérieur pût désormais exercer, « par mesure de police, » les droits conférés au « pouvoir exécutif » par la loi de vendémiaire an VI. C’est dans cet esprit que fut votée la loi du 3 décembre 1849.

« Le ministre de l’intérieur, dit-elle (article 7), pourra, par mesure de police, enjoindre à tout étranger voyageant ou résidant en France, de sortir immédiatement du territoire français et le faire conduire à la frontière. Il aura le même droit à l’égard de l’étranger qui aura obtenu l’autorisation d’établir son domicile en France; mais, après un délai de deux mois, la mesure ce sera d’avoir effet si l’autorisation n’a pas été révoquée suivant la forme indiquée dans l’article 3 (c’est-à-dire par décision du gouvernement, qui devra prendre l’avis du conseil d’État). Dans les départemens-frontières, le préfet aura le même droit à l’égard de l’étranger non résidant, à la charge d’en référer immédiatement au ministre de l’intérieur. » « Tout étranger (article 8) qui se serait soustrait à l’exécution des mesures énoncées dans l’article précédent ou dans l’article 272 du Code pénal ou qui, après être sorti de France par suite de ces mesures, y serait rentré sans la permission du gouvernement, sera traduit devant les tribunaux et condamné à un emprisonnement d’un mois à six mois. Après l’expiration de sa peine, il sera conduit à la frontière. » Ainsi donc les droits qui n’avaient appartenu qu’au chef du gouvernement étaient transportés à un ministre, et même, dans certains cas, aux préfets des départemens-frontières. On avait compris, d’un autre côté, qu’il fallait absolument distinguer des étrangers en général ceux qui avaient été admis, conformément à l’article 13 du code civil, à établir leur domicile en France et l’effet de l’expulsion cessait à leur égard si le chef du pouvoir exécutif n’avait pas rétracté son autorisation dans les deux mois. Enfin on généralisait la mesure prise en 1834 par les pouvoirs publics à l’égard des réfugiés qui rentraient sur le territoire et l’on infligeait une peine corporelle aux expulsés qui enfreignaient l’arrêté d’expulsion,

Ce système, qu’il s’agit aujourd’hui de modifier, ne heurte pas,