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restitutions ultérieures des compagnies ; ces personnes ne tiennent aucun compte du caractère tout à fait conditionnel et successif des remboursemens auxquels les compagnies sont tenues. En consentant à se libérer à bref délai, soit totalement, soit partiellement vis-à-vis du trésor, les compagnies font un sacrifice considérable qui représente pour l’état un bénéfice d’un bon nombre de millions.

D’après les plus récens documens officiels, le compte de la dette des compagnies envers le trésor, du chef de la garantie d’intérêts, arrêté au 31 décembre 1879, montait à 494 millions en capital et à 109 millions et demi en intérêts, soit ensemble à plus de 603 millions de francs. La situation de ce compte est à peu près la même aujourd’hui, car si le Midi a pu rembourser environ 6 millions, l’Orléans 3 millions et l’Est quelques centaines de mille francs pour 1880, d’autre part, les intérêts se sont accrus et la compagnie de l’Ouest a même augmenté sa dette en capital. Si rien n’est changé à la situation actuelle, les compagnies rembourseront successivement par fractions, au fur et à mesure que leurs recettes se développeront, la dette qu’elles ont vis-à-vis du trésor. On pense que le Midi pourra verser 7 ou 8 millions pour l’année 1881, l’Orléans 4 ou 5, l’Est peut-être 2 ou 2 1/2. Que sera-t-il de l’année 1882 ? On l’ignore ; mais les plus-values de recettes paraissent devoir être moins considérables et, par conséquent, l’accroissement des remboursemens sera plus lent. Si une année survenait où les recettes des compagnies diminuassent, les remboursemens diminueraient ; si la réduction des recettes, par suite de concurrence, d’abaissement des tarifs ou de tout autre événement, était telle que le revenu net nécessaire pour le dividende réservé ne fût pas dépassé, les remboursemens cesseraient complètement. Si même les recettes tombaient au-dessous de la somme qu’exige le dividende réservé, non-seulement les compagnies cesseraient leurs remboursemens, mais l’état serait tenu de leur faire de nouvelles avances. Tel est le caractère essentiellement conditionnel des remboursemens des grandes compagnies ; c’est pour le trésor une recette probable, mais successive, aléatoire ; c’est, en outre, une créance qui ne porte pour l’état intérêt que pour une partie des sommes qui la composent, à savoir pour les 494 millions dus en capital et non pour les 110 millions qui sont dus en intérêts. Ces réflexions sont bien simples ; cependant nous ne sachions pas que personne en ait tenu compte, pas même l’honorable M. Varroy, dans sa déposition à la commission des chemins de fer.

Cette ressource éventuelle et graduelle, on veut la transformer en une ressource ferme et immédiate. On ne peut le faire pour l’ensemble de la dette des compagnies. Sur les 604 millions, il y en a 177, nous pouvons même dire 190, qui sont dus par la compagnie de l’Ouest ; or cette compagnie est encore besogneuse ; elle devra